Transcription
Transcription : L'honorable Jocelyne Bourgon
Descriptif EFPC : Réflexions sur le leadership des sous-ministres avec Jocelyne Bourgon
[00:00:00 La vidéo s'ouvre sur un montage de vues du bâtiment de l'EFPC, du bureau du sous-ministre et de l'équipe installant son équipement pour l'entrevue. Jocelyne Bourgon prend place dans une salle historique. Texte à l'écran : Réflexions sur le leadership des sous-ministres, avec Jocelyne Bourgon. Une musique inspirante joue pendant que les questions sont posées.]
[00:00:21 Texte superposé à l'écran : L'honorable Jocelyne Bourgon, C.P., O.C., est présidente et fondatrice de la Gouvernance publique internationale. Elle est aussi présidente émérite de l'École de la fonction publique du Canada et dirige l'initiative New Synthesis.]
[00:00:31 Texte superposé à l'écran : Madame Bourgon a été greffière du Conseil privé, secrétaire du Cabinet et chef de la fonction publique de 1994 à 1999. Elle a dirigé la fonction publique du Canada dans certaines de ses réformes les plus importantes depuis les années 1940.]
[00:00:45 Jocelyne Bourgon apparaît en plein écran. Texte superposé à l'écran : Où; êtes-vous née? ]
Jocelyne Bourgon : Je suis née à Papineauville, j'ai grandi dans l'Outaouais, j'ai étudié à Montréal, j'ai vécu à Québec et je suis venue m'installer à Ottawa.
[00:01:02 Texte superposé à l'écran : Que vouliez-vous faire lorsque vous étiez enfant? ]
Jocelyne Bourgon : Je n'en avais aucune idée. Cela m'a posé un problème lorsque j'ai dû décider dans quel domaine j'allais étudier. J'ai procédé à un processus d'élimination complètement fou. Je me suis demandé ce que je ne pourrais pas apprendre par moi-même. Il y a toutes sortes de choses que l'on peut apprendre par soi-même. Et j'en suis arrivé à la conclusion que ce que je ne pourrais pas apprendre par moi-même serait les sciences, les sciences pures. C'est pourquoi j'ai décidé de m'orienter vers les sciences.
[00:01:38 Texte superposé à l'écran : Avez-vous eu des héros en grandissant? ]
Jocelyne Bourgon : Mes grands-parents, mes parents, mais un attachement très particulier pour mes grands-parents maternels. Ma grand-mère était géniale. C'est une femme remarquable, d'une grande intelligence, d'une grande finesse. Elle savait tout faire et elle s'intéressait à tout, elle lisait tout. Elle avait des opinions, elle avait des idées.Elle était joyeuse. Mon grand-père est un artisan. Je dirais peut-être un artiste mais surtout un artisan ; il pouvait tout fabriquer de ses mains. Et tous les deux étaient d'une générosité remarquable. J'attendais avec impatience le moment où; on allait passer les vacances d'été chez les grands-parents maternels.
[00:02:28 Texte superposé à l'écran : Où; êtes-vous allée à l'université? ]
Jocelyne Bourgon : Eh bien, mon premier diplôme est en sciences.
[00:02:36 Image extérieure de l'Université de Montréal. Texte à l'écran : Elle est titulaire d'un baccalauréat en sciences de l'Université de Montréal.]
Jocelyne Bourgon : Mon brillant raisonnement à l'époque était que la physique était le domaine qui avait transformé les sciences dans les années 1930 et 1940.
[00:02:48 Jocelyne Bourgon apparaît en plein écran.]
Jocelyne Bourgon : Par exemple, les travaux d'Einstein et de beaucoup d'autres. À l'époque, je pensais que la prochaine révolution scientifique serait la biologie – la génétique, la biologie moléculaire – qui transformerait non seulement le monde physique, mais aussi ce que signifie être humain, le mélange de la nature et de l'humanité. J'ai donc décidé de m'orienter vers la biologie, d'étudier la génétique, la physiologie et toutes ces choses. Et je dois admettre que cela me plaisait beaucoup. J'étais prête à faire ma maîtrise et mon doctorat et je comptais faire une grande découverte dans le domaine de la bio-ingénierie.
[00:03:30 Texte superposé à l'écran : Comment était le Canada lorsque vous alliez à l'université? ]
Jocelyne Bourgon : Je fais [partie de] la génération [où;] les associations étudiantes ont pris le contrôle de leur campus dans les années 1960.
[00:03:43 Image d'étudiants des années 1960 manifestant depuis un balcon à Montréal.]
Jocelyne Bourgon : Je suis donc de cette génération-là.
[00:03:50 Jocelyne Bourgon apparaît en plein écran.]
Jocelyne Bourgon : Les occupations des années '68, les grandes manifestations. Le Canada et le Québec — parce que je suis du Québec et je grandissais au Québec — étaient une zone fascinante. C'est une période de grands changements. C'est une génération, qui contrairement à ses parents, n'a pas vécu les effets des deux grandes guerres mondiales et qui n'a pas vécu le crash financier des années '20. Et donc c'est une génération qui se sent plus libre et qui revendique plus de liberté finalement ; à juste titre ou non c'est un autre débat mais c'est une période fascinante et riche de changements politiques, sociologiques, économiques et il y a plein de possibilités qui émergent. Donc c'est joyeux. Il y a un aspect dynamique et joyeux à cette période.
[00:04:38 Texte superposé à l'écran : Vous considériez-vous comme une révolutionnaire ?
Jocelyne Bourgon : Il y a un poète français qui dit : « Si on n'est pas révolutionnaire à 20 ans on n'a pas de cœur et si on l'est encore à 50 ans, on n'a pas de tête ». Donc il y a un cheminement humain là-dedans. Est-ce que j'étais de ceux qui revendiquaient ? Oui.
[00:05:03 Image superposée d'étudiants des années 1960 manifestant dans les rues de Montréal.]
Jocelyne Bourgon : Est-ce que j'ai fait partie de l'occupation des cégeps en '68? Oui. Est-ce que j'ai aidé à ma faculté à débrayer sur le campus de l'Université de Montréal? Oui. Est-ce que je faisais partie d'associations étudiantes? Oui. Il y avait des idées et se manifester de cette richesse de débats, il y avait quelque chose d'absolument fascinant. Est-ce que c'est révolutionnaire ? Non. Est-ce que c'est transformateur? Oui et il y a une immense différence.
[00:05:30 Texte superposé à l'écran : Qu'avez-vous fait après votre baccalauréat? ]
Jocelyne Bourgon : Eh bien, une série d'événements a eu lieu par la suite. Le premier s'est déroulé cet été-là même. J'ai obtenu mon diplôme, j'ai terminé mon baccalauréat, je m'apprêtais à faire ma maîtrise en biologie moléculaire. Et cet été-là, j'ai travaillé précisément dans mon domaine. J'ai donc pu voir concrètement à quoi cela ressemblerait si je faisais ma maîtrise et mon doctorat.
Tout au long de cet été, j'ai observé le chef du laboratoire. Il passait la moitié de son temps à rédiger des articles pour obtenir des subventions. Il consacrait un quart du temps qui lui restait à la gestion du personnel en place. Il passait une autre fraction de son temps à produire un article parce qu'il le fallait. Et il n'avait pratiquement pas le temps, sauf la nuit, de faire les recherches qu'il voulait faire. C'était très révélateur.
Deuxièmement, j'ai découvert qu'il s'agit d'un travail solitaire. Et même si j'aime la beauté des études scientifiques – les sciences sont d'une grande beauté, intellectuellement, esthétiquement – c'est phénoménal, c'est tout un monde en soi. Même si j'aime la beauté de l'apprentissage, je n'étais pas faite pour assumer la solitude qui l'accompagne dans la pratique. Bien que la science soit un sport d'équipe, il y a un aspect de solitude qui ne me convenait pas.
[00:07:13 Texte superposé à l'écran : Quel était le sujet de votre maîtrise ? ]
Jocelyne Bourgon : Alors, j'ai fait une maîtrise en gestion,
[00:07:19 Image extérieure superposée de l'Université d'Ottawa. Texte à l'écran : Elle détient également une maîtrise en gestion de l'Université d'Ottawa.]
Jocelyne Bourgon : parce que cela me donnait le temps de voir comment je voulais réorienter ma réflexion et mes études, etc. J'ai donc commencé une maîtrise.
[00:07:32 Texte superposé à l'écran : Quel a été votre premier emploi au sein du gouvernement du Canada ? ]
Jocelyne Bourgon : La chance a frappé pour la deuxième fois. Cet été-là, alors que j'avais fait plus de la moitié de ma maîtrise, j'ai été recrutée comme étudiante.
[00:07:47 Texte superposé à l'écran : En 1973, Mme Bourgon s'est jointe au gouvernement du Canada comme étudiante d'été au ministère des Transports.]
Jocelyne Bourgon : par le ministère des Transports du gouvernement du Canada. Je ne connaissais rien du secteur public. Personne dans ma famille n'a jamais travaillé dans le secteur privé.
[00:07:57 Texte superposé à l'écran : Correction: Personne dans ma famille n'a travaillé pour le secteur public.]
Jocelyne Bourgon : Je n'avais aucun avis, ni positif ni négatif. J'avais besoin d'un emploi pour financer mes études à partir de septembre. Dès mon arrivée, on m'a donné un projet et j'ai été époustouflée. Il y a des gens qui passeront toute leur vie à chercher quelque chose qui les passionne. Je l'ai découvert par hasard et cela me passionne encore aujourd'hui. Je suis passionnée par le gouvernement, la gouvernance, l'administration publique, la fonction publique, le rôle des dirigeantes et dirigeants du secteur public. C'est mon créneau, c'est mon chez-moi.
[00:08:32 Texte superposé à l'écran : Quel a été votre premier emploi en tant que cadre au sein du gouvernement du Canada? ]
[00:08:39 Texte superposé à l'écran : Pêches et Océans Canada de 1975 à 1983 : elle devient directrice générale de la région du Québec en 1981.]
Jocelyne Bourgon : J'étais directrice générale de Pêches et Océans pour la région du Québec.
[00:08:44 Texte superposé à l'écran : Quand êtes-vous devenue sous-ministre adjointe ? ]
Jocelyne Bourgon : Lorsque je suis allée au bureau des relations fédérales-provinciales,
[00:08:52 Texte superposé à l'écran : Directrice générale au ministère de l 'Expansion industrielle régionale en 1983.]
Jocelyne Bourgon : à l'époque, le premier ministre Mulroney était là, et il avait lancé un cycle annuel de rencontres des premiers ministres sur l'économie.
[00:09:01 Texte superposé à l'écran : Sous-ministre adjointe au Bureau des relations fédérales-provinciales en 1985.]
Jocelyne Bourgon : Et le Bureau des relations fédérales-provinciales devait constituer une équipe pour soutenir les efforts du premier ministre à cet égard. Par ailleurs, il a décidé de lancer les négociations canado-américaines, ce qui a également été ajouté à mon portefeuille.
Je combinais donc un portefeuille économique, les conférences économiques annuelles des premiers ministres et toutes les réunions des premiers ministres sur les négociations canado-américaines.
[00:09:29 Texte superposé à l'écran : Pouvez-vous nous parler davantage de la période où; vous avez travaillé sous le régime du premier ministre Mulroney ? ]
Jocelyne Bourgon : La période sous le premier ministre Mulroney a été à la fois difficile et passionnante à bien des égards. Permettez-moi de rembobiner un peu le film. Au cours de la période précédente, la situation budgétaire du Canada n'avait cessé de se dégrader. Et parmi toute la population du pays, les personnes qui savaient le mieux que cette situation était insoutenable étaient les fonctionnaires. Les fonctionnaires savaient pertinemment qu'il fallait rectifier le tir.
Voilà qu'arrive un premier ministre qui avait fait un certain nombre de commentaires négatifs sur la fonction publique en tant qu'institution.
[00:10:17 Image superposée du premier ministre Mulroney. Texte à l'écran : Brian Mulroney, lorsqu'il a été élu premier ministre, s'est méfié de la fonction publique et a promis de distribuer aux fonctionnaires « des avis de congédiement et des espadrilles ».]
Jocelyne Bourgon : Mais dès son arrivée, il a tout de suite commencé à travailler avec la fonction publique. Tout de suite. Et il était un dirigeant transformateur. Il voulait réaliser des choses que les gens autour de lui jugeaient impossible de faire. C'était très risqué. Il fallait faire preuve de prudence. Il avait un programme très ambitieux. Ainsi, l'idée d'organiser chaque année une réunion sur l'économie avec tous les premiers ministres était novatrice.
L'idée que je me faisais de ce petit projet était que ce premier ministre avait, à lui seul, sensibilisé la population canadienne aux conséquences d'une dette et d'un déficit croissants. J'ai une vision de lui lors de la réunion des premiers ministres, avec des graphiques à la main et une caméra qui tourne, où; il explique à la population canadienne que cela compromet les générations futures. Et ce n'est pas parce que l'idée de s'attaquer au déficit bénéficiait d'un soutien. C'est parce que le premier ministre avait décidé d'éduquer tout le monde et de les faire bouger pour que cela devienne possible. Et c'est ce qu'il a fait.
[00:11:31 Texte superposé à l'écran : Comment êtes-vous devenue sous-ministre ? ]
Jocelyne Bourgon : J'ai quitté le Bureau des relations fédérales-provinciales après avoir fait plusieurs réunions annuelles sur l'économie et avoir eu la joie de suivre ce qui se passait dans les négociations canado-américaines. J'ai alors décidé de passer au ministère de l'Énergie, des Mines et des Ressources à la suite d'une mutation latérale.
[00:11:54 Texte superposé à l'écran : Sous-ministre adjointe, Secteur de la Politique ministérielle et des communications, ministère de l'Énergie, des Mines et des Ressources en 1987.]
Jocelyne Bourgon : Je n'étais pas pressée d'obtenir une promotion. Je voulais en apprendre plus. Il s'agissait d'un domaine où; les politiques et le paysage géopolitique évoluaient et où; l'un des meilleurs sous-ministres était en poste. C'était donc une très bonne école. C'est là que j'ai poursuivi mon chemin.
Et c'est après un certain nombre d'années passées dans ce ministère que le téléphone a fini par sonner et que Paul Tellier m'a demandé si j'accepterais d'être sous-ministre du ministère de la Consommation et des Affaires commerciales.
[00:12:28 Image superposée de Jocelyne Bourgon. Texte à l'écran : Sous-ministre de la Consommation et des Corporations en 1989.]
Jocelyne Bourgon : Je suis restée bouche bée pendant quelques secondes et je lui ai dit que j'en serais honorée. Tellier m'a confié : « Je savais que vous viendriez un jour. »
[00:12:43 Texte superposé à l'écran : Quelle a été votre deuxième affectation en tant que sous-ministre ? ]
Jocelyne Bourgon : J'ai été ramenée du ministère de la Consommation et des Affaires commerciales au centre.
[00:12:55 Texte superposé à l'écran : Secrétaire associée, puis secrétaire du Cabinet pour les relations fédérales-provinciales en 1991 et 1992.]
Jocelyne Bourgon : Le premier ministre Mulroney était alors dans la foulée de l'Accord du lac Meech.
[00:13:06 Image superposée d'un grand titre du journal Nouvelles Quotidiennes daté du 26 juin 1990. Texte à l'écran : L'échec de l'Accord du lac Meech.]
Jocelyne Bourgon : L'Accord avait échoué et le pays était dans une situation pire qu'auparavant. Il fallait faire quelque chose, alors Tellier m'a demandé d'assumer le rôle de secrétaire associée du Cabinet, la responsabilité du prochain chapitre.
Inutile de dire que je n'étais pas très enthousiaste à l'idée de quitter mon ministère. Et je pensais vraiment que je n'étais pas la bonne personne pour le faire. J'ai donc argumenté, mais je n'ai convaincu personne. C'est ainsi que j'ai fini par devenir secrétaire associée du Cabinet.
[00:13:52 Texte superposé à l'écran : Pourriez-vous nous parler davantage des événements qui ont mené à l'Accord de Charlottetown ? ]
Jocelyne Bourgon : La tentative de rapatriement avait divisé le pays. Elle a eu pour conséquence de donner quelque chose, mais aussi de détruire quelque chose. L'Accord de Meech avait une vision étroite des choses. Son succès était tenu pour acquis. On n'avait donc pas vraiment envisagé les conséquences d'un échec. Et les conséquences ont été graves.
À partir de là, on est entré dans une phase différente, où; le premier ministre Bourassa essayait essentiellement de gagner du temps et de laisser la poussière tomber, et où; le premier ministre Mulroney faisait de même. Et un jour, le premier ministre a déclaré à la Chambre des communes que le Canada déposerait alors une proposition. Cette annonce a déclenché le processus de négociation de l'Accord de Charlottetown.
[00:14:57 Image superposée du premier ministre Mulroney et des délégués à l'Accord de Charlottetown.]
Jocelyne Bourgon : Il s'en est suivi des négociations très intenses. À la table, on comptait dix provinces, deux territoires et quatre associations autochtones nationales. Vous aviez donc affaire à 17 délégations; vous cherchiez à trouver le bon compromis, à trouver le chemin de la moindre résistance, et à en arriver à un consensus. Il s'agissait d'un projet de grande envergure et extrêmement ambitieux.
[00:15:36 Image superposée de l'Accord de Charlottetown. Texte à l'écran : Consensus Report on the Constitution, Charlottetown, August 28, 1992, Final Text. (Rapport de consensus sur la Constitution, Charlottetown, 28 août 1992, texte final).]
Jocelyne Bourgon : La principale caractéristique de l'Accord de Charlottetown était d'ordre institutionnel.
Il redéfinissait le rôle de la Chambre des communes pour qu'elle se concentre d'abord et avant tout sur la représentation de la population. Il est ahurissant de constater que, selon cet accord, le Québec recevrait la garantie de ne jamais avoir moins de 25 % des membres de la députation de la Chambre, en reconnaissance du fait que la province devait protéger une population habitant un continent nord-américain. Il redéfinissait le rôle du Sénat, qui devenait une chambre élue et donc une institution puissante et égale, une véritable chambre des provinces. Et il proposait un régime d'autonomie gouvernementale à la communauté autochtone, lui conférant un statut intermédiaire entre les provinces et les municipalités.
Ainsi, la principale réalisation de l'Accord de Charlottetown, que nous avons tous oubliée, était la réforme institutionnelle. Au bout du compte, était-il raisonnable de s'attendre à ce que la population canadienne puisse assimiler le contenu de cette réforme et se prononcer en 30 jours au terme d'une campagne référendaire?
En fin de compte, la population canadienne, dans sa grande sagesse, a décidé que, devant son manque de connaissances sur ce projet de réforme, le statu quo avait meilleur goût. Et c'est essentiellement ce qui s'est passé. Tout le monde a voté non avec une faible marge, mais personne n'a été rejeté. Donc, pas de drame comme pour l'Accord du lac Meech, mais dans l'ensemble du pays, le projet de réforme a été rejeté par environ 52 %, 53 %, 50 % de la population. Encore une fois, personne n'a été rejeté. Et je pense que c'est important de le préciser.
[00:17:18 Texte superposé à l'écran : Quelle a été votre affectation suivante en tant que sous-ministre ? ]
Jocelyne Bourgon : Le premier ministre Mulroney a alors fait quelque chose de tout à fait inhabituel. Après les négociations de l'Accord de Charlottetown, mon travail à moi consistait à négocier. Son travail à lui consistait à organiser un référendum. Une fois qu'il est rentré à la maison et que la partie était perdue, je me souviens que j'étais fatiguée, et honnêtement, je ne voulais rien d'autre que de rentrer chez moi. Je voulais passer du temps avec ma famille.
J'ai donc décidé de prendre un congé. J'ai dit merci à tout le monde. Je devais partir. J'ai trouvé des emplois pour mon personnel et j'ai réduit mon équipe. Une fois ce travail terminé, je suis rentrée chez moi, juste avant Noël.
Au début de la nouvelle année, le premier ministre m'a appelée et m'a dit : « Qu'aimeriez-vous faire plus tard? » Cela était inhabituel. Les premiers ministres n'ont pas l'habitude de demander aux sous-ministres ce qu'ils ou elles aimeraient faire. Je lui ai répondu que j'avais besoin de plus de stabilité. Je voulais être à la maison le soir. Je voulais voir mon fils grandir, donc je voulais un travail plus flexible qui ne m'obligerait pas d'être tout le temps sur la route. J'ai mentionné l'Agence canadienne de développement international (ACDI) et j'ai appris ensuite que le greffier m'avait mutée à cette agence. J'ai ressenti une immense gratitude, car c'était un cadeau. Un cadeau exceptionnel.
Il y a une chose qu'il n'avait pas prévue, et que je n'avais pas prévue non plus, c'est que – eh bien, il avait prévu de partir, de se retirer, et il travaillait dur pour préparer le terrain pour sa successeure. Sa successeure, la première ministre Campbell, est entrée en fonction et a travaillé avec un nouveau greffier jusqu'à son départ, et les deux ont travaillé sur une grande réorganisation lancée en 1993. À la suite de cette réorganisation, on m'a mutée de l'ACDI et j'ai été nommée au ministère des Transports.
[00:19:22 Texte superposé à l'écran : Sous-ministre des Transports en 1993.]
Jocelyne Bourgon : Ce fut un moment très difficile, car il s'agissait pour moi d'un manque de respect envers les membres du personnel de l'ACDI. Ces personnes avaient changé de ministre, elles avaient perdu leur premier vice-président qui avait pris sa retraite, elles venaient de changer de sous-ministre, et maintenant, c'est moi qui partais.
Vous devez faire preuve de loyauté envers votre équipe. De la loyauté envers l'institution, envers le gouvernement du Canada, mais aussi envers votre équipe. Votre équipe vous fait confiance. Et j'ai trouvé que c'était un manque de respect envers les membres du personnel de l'ACDI. Honnêtement, je suis tombée amoureuse du ministère des Transports, donc je n'ai jamais regretté d'y avoir travaillé, loin de là. Mais aujourd'hui, en voyant la façon dont les choses se sont déroulées, je pense que cela aurait pu être mieux fait.
[00:20:13 Texte superposé à l'écran : Pourriez-vous nous parler de votre expérience pendant votre séjour à Transports Canada ? ]
Jocelyne Bourgon : Le ministère des Transports a été ma dernière classe de maître avant de devenir greffière. Je ne le savais pas. Je n'en avais aucune idée. Mais c'était une classe de maître.
Le ministère des Transports avait trop de tout. Il était propriétaire, exploitant et organisme de réglementation de tous les aéroports. Un mandat trop important, des capacités et des ressources insuffisantes. Et la question que je n'arrêtais pas de poser est la suivante : que se passerait-il si nous réinventions le ministère des Transports avec les moyens collectifs de la population canadienne? À quoi cela ressemblerait-il? Que devons-nous préserver et à partir de quoi pouvons-nous construire?
Et j'ai commencé à travailler avec l'équipe de direction et je relevais du ministre Corbeil; c'était la dernière année du gouvernement conservateur. À la fin de l'année, nous avions, collectivement, mon équipe et l'équipe de direction, une vision de ce que le ministère pourrait être. Mais c'était très audacieux. C'était très audacieux et très différent du statu quo.
Un nouveau gouvernement et un nouveau ministre sont arrivés.
[00:21:33 Image superposée du ministre Young.]
Jocelyne Bourgon : Le ministre Young était courageux, il avait un capital politique et il avait envie d'agir. Puis nous avons recommencé le tout : les mêmes pièces, la même discussion, le même travail d'exploration, et nous en sommes arrivés à des conclusions plutôt similaires. Dans l'ensemble, nous avons fait les mêmes constats, mais chaque ministre exerce son propre jugement politique sur ce qui serait défendable, sur ce qui serait soutenu par l'opinion publique. Et nous nous sommes retrouvés avec le plan de transformation le plus exhaustif pour ce ministère.
[00:22:04 Texte superposé à l'écran : Comment êtes-vous devenue greffière du Conseil privé ? ]
Jocelyne Bourgon : Le premier ministre Chrétien m'a demandé de me rendre au 24, promenade Sussex.
[00:22:14 Image superposée du premier ministre Chrétien et Jocelyne Bourgon. Texte à l'écran : Le 28 mars 1994, Jocelyne Bourgon devient greffière du Conseil privé et secrétaire du Cabinet.]
Jocelyne Bourgon : Cela aussi est inhabituel. Alors, vous vous demandez : de quoi pourrait-il s'agir?
[00:22:21 Texte superposé à l'écran : Elle devient ensuite présidente du Centre canadien de gestion en 1999. Ambassadeur du Canada auprès de lOrganisation de coopération et de développement économique de 2003 à 2007.]
Jocelyne Bourgon Mais, au moment où; nous négociions, il y avait le dossier de l'aéroport Pearson, qu'il ne souhaitait pas privatiser, contrairement au gouvernement précédent. Et je me trouvais au milieu de tout cela. Je me suis donc dit que j'allais peut-être me faire sermonner sur ce que j'aurais pu faire mieux. Mais je pensais que nous avions bien travaillé, alors je ne m'inquiétais pas. Puis, je me suis dit qu'il y avait peut-être autre chose, et que nous allions le découvrir.
Il m'a posé des questions sur la fonction publique, sur la communauté des sous-ministres, sur les points forts. Je lui ai donné un aperçu remarquable des points forts de la communauté des sous-ministres, en accordant une attention particulière à l'étendue des connaissances, à l'expertise, au profond savoir-faire, etc.
Ensuite, la discussion s'est tournée un peu plus sur la question de savoir qui pourrait être le greffier ou la greffière. J'ai alors proposé une longue liste de personnes qui font un excellent travail. Puis, il m'a dit : « Et vous? » Je lui ai répondu : « Je pense que vous pouvez faire beaucoup mieux. » Je ne dévoile pas de secret parce qu'il a plaisanté publiquement à ce sujet, sinon je ne reviendrais pas là-dessus.
[00:23:42 Texte superposé à l'écran : Quelle est la différence entre le greffier du Conseil privé et le secrétaire du Cabinet ? ]
Jocelyne Bourgon : Le greffier ou la greffière appuie le premier ministre ou la première ministre en tant qu'institution.
[00:23:52 Image superposée du premier ministre Chrétien, Jocelyne Bourgon et un autre homme assis au bureau du premier ministre.
Jocelyne Bourgon : Et le premier ministre ou la première ministre a une prérogative exclusive dans certains domaines. Mais votre rôle principal est de vous assurer d'être en contact avec le premier ministre ou la première ministre en tant que chef de l'exécutif, de vous assurer que le programme en cours d'élaboration est alimenté et renvoyé à la fonction publique de sorte qu'il y ait un alignement. Vous alignez une dirigeante ou un dirigeant politique dans un système de gouvernement sur la capacité en temps réel de la fonction publique professionnelle. Par conséquent, vous reliez ces deux parties chaque jour.
Le rôle de secrétaire du Cabinet est différent. La véritable autorité du premier ministre ou de la première ministre est de présider un système de cabinet, un système de gouvernement basé sur un cabinet. Et l'autorité est entre les mains des ministres. Par conséquent, le ou la secrétaire du Cabinet aide le premier ministre ou la première ministre à présider le Cabinet. Mais il ou elle est au service du Cabinet dans son ensemble.
Et l'ingrédient clé d'un système de gouvernement basé sur un cabinet, ce sont des ministres qui comprennent ce que c'est que d'être ministre, et qui sont capables et ont envie d'exercer pleinement leur autorité. Il y a des jours où; vous défendez les ministres dans leur relation avec le premier ministre ou la première ministre. Il y a des jours où; vous défendez la personne qui préside le système de Cabinet dans l'alignement de la contribution des ministres. Vous êtes secrétaire d'un système de Cabinet.
[00:25:25 Texte superposé à l'écran : Pourriez-vous nous parler davantage du budget fédéral canadien de 1995 et de la manière dont vous l'avez abordé ? ]
Jocelyne Bourgon : Nous savions qu'il était nécessaire d'éliminer le déficit, et nous savions qu'il s'agirait d'une transformation profonde du secteur public. Nous avions proposé une approche, acceptée par le premier ministre de l'époque, qui permettait à chaque ministère d'apporter ses idées les plus courageuses. En voyant le projet prendre forme, nous savions à quel point il serait exhaustif. Cela allait toucher directement des dizaines de milliers de membres du personnel, et indirectement tout le monde. Et il y avait un risque que, dans le processus, la capacité institutionnelle soit ébranlée.
J'ai donc fait appel à des forces opposées. Nous voulions examiner comment repositionner le gouvernement du Canada et, en même temps, comment repenser la fonction publique. En attirant l'attention sur la manière de repenser la fonction publique, j'essayais d'éviter que les fonctions essentielles ne soient perturbées.
Deux des groupes de travail se sont penchés sur la prestation de services. En fin de compte, il s'agit de servir la population canadienne. Mais la population canadienne s'attendait à une façon de servir qui serait différente de l'approche traditionnelle. Prestation de services horizontale, prestation de services intégrée, guichet unique, prestation de services assistée par la technologie, service en ligne, service selon ses conditions, par opposition à l'organisme de prestation.
Deux groupes ont abordé cette question. Un ou deux groupes se sont penchés sur la capacité en matière de politiques. L'un des dangers de toutes les réductions qui avaient lieu est que les ministères pourraient être enclins à faire des coupes là où; c'est facile. Et il pourrait être facile de réduire votre capacité de recherche, qui est votre bouée de sauvetage en tant qu'organisation publique professionnelle et non partisane.
Un groupe de travail s'est penché sur la question suivante : quel est notre niveau de rendement? Quel est l'état de notre capacité en matière de politiques? Sommes-nous à la traîne? Que devons-nous construire? Et ainsi de suite. Un autre s'est penché sur la question de l'élaboration horizontale des politiques. Nous savions qu'un nombre croissant de questions complexes ne pouvaient pas être abordées en travaillant en vase clos dans un seul ministère – il fallait travailler sur la base de connaissances partagées au sein d'un certain nombre d'organisations pour mettre au point des solutions viables. C'est pourquoi nous avons créé ces deux groupes. Deux se sont penchés sur les services et les deux autres, sur les politiques.
[00:27:59 Texte superposé à l'écran : Vous avez toujours mis l'accent sur la gestion des talents et sur l'offre de réelles options d'avancement. Pourquoi était-ce si important pour vous ? ]
Jocelyne Bourgon : Toutes les parties prenantes dans la fonction publique, y compris les personnes occupant des postes de haut niveau, ont le devoir de laisser derrière elles des institutions en meilleur état que celles dont elles ont hérité. Nous héritons de ce que nous avons et nous partons du point où; nous sommes. Mais nous devons laisser les choses en meilleur état qu'elles ne l'étaient avant.
J'étais parfaitement consciente d'avoir bénéficié, au fur et à mesure que je gravissais les échelons de la fonction publique, d'une grande diversité d'expériences. J'avais occupé des postes d'état-major et géré des services hiérarchiques. J'avais travaillé à l'administration centrale ainsi que dans les régions. J'avais travaillé dans le domaine de la politique, de la prestation de services et des organismes centraux. Et le tout est venu compléter l'expérience des personnes occupant des postes de haut niveau dans le secteur public. Je pensais que c'était un atout. Et si nous pouvions aider les personnes à acquérir une expérience diversifiée au fur et à mesure de leur croissance, elles seraient mieux préparées à occuper des postes de haut niveau dans le secteur public. C'était une hypothèse.
Selon une autre hypothèse, il y avait eu tellement d'années de réduction des effectifs, de coupes et de gel, que certaines des personnes qui progressaient, qui se développaient, avaient été privées de la possibilité de concourir pour des postes, d'accéder à des échelons supérieurs et d'acquérir la diversité de connaissances et d'expériences dont je parlais.
D'une part, j'étais consciente des avantages de la diversité. D'autre part, j'étais consciente que nous avions privé les personnes d'un certain nombre de possibilités de développement – de développement personnel.
[00:29:45 Texte superposé à l'écran : Que signifie le leadership pour vous ? ]
Jocelyne Bourgon : Je trouve toujours qu'il y a un risque de confusion entre gestion et leadership. Permettez-moi de démêler tout cela, car il est difficile de répondre à l'un sans aborder l'autre.
Les gestionnaires exercent une autorité dans un but précis. Les gestionnaires doivent pouvoir gérer, connaître l'étendue de leur autorité et être en mesure de l'utiliser jusqu'à ses limites. La gestion et l'exercice de l'autorité sont une chose. Le leadership en est une autre. Le leadership permet d'aller là où; l'autorité ne peut pas aller.
Et le leadership n'est pas lié à votre ancienneté dans l'organisation. Le leadership, c'est le pouvoir des idées qui mobilisent les autres pour avancer avec vous, en tandem, de manière convergente, pour réaliser quelque chose que vous jugez meilleur que ce qui existait auparavant. Il s'agit donc d'un sport collectif. Il ne s'agit pas de dire : c'est moi qui ai l'autorité. C'est un sport collectif qui aligne les connaissances, le savoir-faire et les capacités sur un objectif, et qui ne peut être célébré que dans le cadre d'un effort d'équipe. La distinction entre les deux est donc importante à mes yeux, car en les confondant, nous perdons de vue l'un et l'autre.
Vous savez, l'une des questions les plus importantes que les dirigeantes et dirigeants du secteur public peuvent poser à leur équipe est la suivante : comment tout cela s'articule-t-il? La magie ne réside pas dans les pièces. La magie réside dans le tissage, le tricotage de nombreuses pièces qui aboutissent à une façon différente de penser, à une vision différente de l'avenir, à une possibilité différente, à une manière différente d'aller de l'avant. C'est donc en réunissant les connaissances approfondies et les perspectives générales que l'on peut élaborer un programme ambitieux et transformateur.
[00:31:51 Texte superposé à l'écran : Qu'est-ce qui a continuellement suscité votre intérêt pour la fonction publique ? ]
Jocelyne Bourgon : J'ai toujours étudié l'administration publique. Rappelez-vous quand j'ai mentionné que j'avais été recrutée comme étudiante et que ce que j'avais découvert n'était pas exactement le travail que je faisais. J'ai découvert la fonction publique. J'ai découvert que le gouvernement peut changer les choses. Et au fil de ma carrière, ce qui m'a toujours passionné, c'est cette prise de conscience de plus en plus profonde qu'il n'y a pas de pays performant sans un État performant, sans un gouvernement performant, sans des institutions publiques performantes. C'est pourquoi j'ai toujours cherché à savoir : que signifie gouverner? Que signifie servir? Que devons-nous faire pour que le Canada fasse partie des pays qui traverseront avec succès une période de changement sans précédent? C'est passionnant.
J'ai donc toujours étudié l'administration publique et la gouvernance, mais c'est dans l'action que l'on apprend. Et lorsque j'ai quitté la fonction publique, j'ai eu peur de perdre ou de rater les leçons apprises sur le terrain. J'ai donc inventé un moyen de rester en contact avec les praticien·nes.
[00:33:23 Texte superposé à l'écran : Le réseau de recherche New Synthesis a été lancé en 2007. La Gouvernance publique internationale a elle été lancée en 2009.]
Jocelyne Bourgon : C'est ainsi que j'ai lancé l'initiative Nouvelle synthèse, qui est un réseau de recherche international, composé en grande partie de praticien·nes de divers pays.
[00:33:29 Image superposée des livres de Jocelyne Bourgon. Texte à l'écran : Mme Bourgon est l'auteure de deux livres sur la nouvelle théorie de l'administration publique, l'un publié en 2011 et l'autre en 2017.]
Jocelyne Bourgon : Nous nous rencontrons, nous échangeons, nous débattons et nous travaillons ensemble dans le même but, à savoir : que dois-je faire dans mon pays pour qu'il soit l'un des rares à traverser avec succès une période de changement sans précédent? Je suis donc praticienne et fière de l'être. J'apprends l'administration publique et j'en suis fière.
[00:33:55 Texte superposé à l'écran : Pouvez-vous nous faire la différence entre la fonction publique fédérale à laquelle vous vous êtes jointe et celle que vous avez quittée ? ]
Jocelyne Bourgon : Elles sont différentes. Permettez-moi d'aborder – dans une perspective à long terme – quelques-uns des changements que je pourrais considérer comme frappants ou significatifs.
Premièrement, il y a une transformation, et je dirais même un risque d'érosion du rôle des ministres. Dans notre système de gouvernement de cabinet et de démocratie parlementaire, l'autorité appartient aux ministres. Pas le pouvoir peut-être, mais l'autorité, oui. Et tout ce qui érode la responsabilité des ministres sape le système. D'une certaine manière, notre système démocratique. Je pense donc que nous devons réfléchir à ce que nous pouvons faire pour redonner toute sa place au rôle de ministre. La démocratie et la créativité s'en trouveront renforcées.
Une deuxième tendance que je trouve significative est qu'au Canada, nous sommes en train de créer des couches entre les représentant·es élu·es et les fonctionnaires professionnel·les. Ces personnes ne sont pas nécessairement partisanes, mais elles sont politiquement alignées. Et ce tampon, cette zone intermédiaire, opère dans un espace d'absence de responsabilité. Elles ne sont ni élu·es, ni responsables, alors qu'un·e·fonctionnaire professionnel·le·est soumis·e à de nombreux freins et contrepoids.
Il y a donc de dangereuses couches d'absence de responsabilité. Auparavant, cette zone était très limitée et n'était donc probablement pas importante, mais elle se développe rapidement. Et à mesure qu'elle se développe, nous devons nous demander comment elle s'intègre. Et si elle continue de croître, nous devons concevoir un système qui renforce la responsabilité pour cette tranche également. Si c'est circonstanciel, nous devons tirer des conclusions différentes.
Mais ce sont des tendances significatives. Il y en a d'autres, mais pas du même genre. Ces deux-là sont d'ordre institutionnel.
[00:36:06 Texte superposé à l'écran : Quels conseils donneriez-vous à un ou une fonctionnaire qui amorce tout juste sa carrière ? ]
Jocelyne Bourgon : Vous entrez dans la fonction publique aujourd'hui et vous apportez des compétences qui n'existaient pas auparavant. Et vous apportez une vision du monde qui n'existait pas auparavant. Et vous serez l'architecte d'une profonde réorganisation.
Vous devrez réfléchir à la manière de concilier la prospérité économique, la solidarité sociale et la capacité à préserver la longévité de la planète. Pas l'un ou l'autre de manière isolée. Vous devrez être l'architecte de la manière dont ces éléments se conjuguent dans tous les aspects du travail du gouvernement dans la société.
Vous devrez inventer des moyens de guider le Canada dans une profonde transformation technologique, sans faire preuve de naïveté et sans prétendre vouloir devenir le ou la spécialiste de l'une ou l'autre de ces techniques. Vous devez réfléchir aux changements technologiques, car chacun d'entre eux présentera des possibilités et des risques phénoménaux pour l'humanité. Qu'il s'agisse de l'intelligence artificielle, de la bio-ingénierie ou de la géo-ingénierie, qui sera probablement la prochaine technologie à frapper la planète de manière très dangereuse.
Vous devez donc réfléchir à la manière dont un pays bénéficie de l'effet multiplicateur de multiples transformations technologiques, de manière à optimiser les avantages et à réduire au minimum la gestion des risques. Il ne s'agira pas de se plonger dans les détails de ces techniques. Il s'agit de réfléchir à leur capacité phénoménale de transformation.
Vous serez donc la génération qui ouvrira la voie à de multiples recalibrages et redéfinitions du rôle de l'État. C'est un grand moment. C'est un grand moment. Vous devrez rétablir le lien entre la liberté, les droits, les sciences humaines et la prospérité en adoptant de nouvelles approches. J'aimerais donc être une étudiante entrant à la fonction publique aujourd'hui. Et si je peux être votre partenaire, comptez sur moi.
[00:38:38 La vidéo se termine sur l'équipe en train de ranger son matériel après l'entrevue.]
[00:38:44 Le logo animé de l'EFPC apparaît à l'écran. Texte superposé à l'écran : canada.ca/ecole.]
[00:38:50 Le mot-symbole du gouvernement du Canada apparaît, puis passe au noir.]