Transcription
Transcription : Conseils judicieux des hauts dirigeants : Plan stratégique, avec Général Walter Natynczyk
Mes réflexions concernant la planification stratégique reflètent beaucoup son application dans la fonction publique. Selon moi, la planification stratégique doit avoir un point de départ et il incombe aux leaders de l'établir. Avant même de donner des directives pour démarrer le plan stratégique, il faut bien connaître son affaire, bien comprendre ses secteurs d'activités. Pour ce faire, il faut aller parler aux employés. Il faut bien saisir ce qu'on tente d'accomplir, le résultat escompté, la mission globale. Mais il faut comprendre tout ça avant même d'élaborer le plan stratégique. Voilà la clé et vous ne la trouverez pas dans votre bureau. Il faut se promener, parler aux gens, obtenir une vision globale de ce qui se passe dans notre ministère. C'est la première étape.
La deuxième étape, lorsque cette connaissance est acquise, c'est de développer un concept initial pour le plan stratégique. Quelle est l'idée maîtresse, la vision globale? Partagez-la avec des membres de votre comité stratégique, échangez des idées, assurez-vous que le concept initial est sain du point de vue de la doctrine et de la fiscalité, bref suffisamment solide pour le partager avec un public plus vaste. Rassemblez ensuite votre équipe de leadership et communiquez votre vision stratégique, votre mission. Confiez-leur le concept en acceptant qu'il sera décortiqué comme un homme de paille. C'est l'occasion pour eux de l'adopter, de l'adapter, et sans doute l'enrichir. Il faut avoir suffisamment confiance en soi pour accepter que le plan initial peut évoluer, et se fier aux gens pour développer les idées selon leurs propres domaines de compétences. Je le répète : je ne suis pas un as des finances ni du droit; ce sont des domaines bien au-delà de mes connaissances, mais chacun de ces axes fonctionnels peut faire évoluer un plan stratégique. Donc assurez-vous d'écouter. Mais rien de tout ça ne peut se produire sans un concept initial et des objectifs fixés à l'avance. Armés de cette ligne directrice, les gens continueront de contribuer au plan, et ce, jusqu'à une date butoir où vous aurez déterminé que le plan est pleinement développé, ou jusqu'à ce que vous soyez en confiance que le plan va réussir sur toute la ligne. Ensuite, le défi est de communiquer cette vision de manière à ce que tous la comprennent, jusqu'aux derniers échelons de la hiérarchie.
La dernière composante est toujours difficile, je me répète il faut déléguer l'autorité, responsabiliser les gens et leur faire confiance de prendre les bonnes décisions. Souvent, la meilleure chose qu'un leader peut faire, c'est de se tasser de là pour que les gens puissent mettre en oeuvre la stratégie. Vous vous entourez des bonnes personnes; vous faites vos devoirs avant d'initier le plan afin d'avoir une bonne vue d'ensemble de votre environnement; vous présentez le concept initial à votre équipe, qui comprend bien les enjeux, et vous les écoutez. Un des problèmes que j'ai constatés auparavant, c'était de voir quelqu'un présenter un plan initial qui s'avérait être un plan final avant même qu'on s'assoit à la table. La discussion qui s'ensuit n'est qu'un exercice inutile si les gens ne s'écoutent pas. Il est absolument essentiel qu'un cadre supérieur ait la flexibilité d'écouter et d'évoluer; de laisser évoluer son plan afin d'en étayer tous les axes. Mais je dirais surtout que le plan doit démarrer avec une mission claire et simple.
Un des principes de guerre, comme on disait, c'est d'établir et de maintenir l'objectif. Parfois les gens lancent un plan avec un objectif en tête qui finit par changer au-delà des facteurs qui avaient été considérés. Voilà pourquoi les phases initiales sont cruciales pour comprendre l'organisation, comprendre le contexte opérationnel, cibler un résultat et ensuite établir et maintenir l'objectif. Je conseillerais aux leaders d'arrêter de parler pour plutôt écouter, et écouter sincèrement afin de donner suite aux commentaires des employés. À nouveau, je crois que les meilleures idées proviennent des niveaux subalternes.
Je peux vous raconter une histoire. En 1996 j'étais le nouveau commandant à Petawawa, en Ontario, et on terminait un très long exercice dans la brousse. J'étais dans un gros véhicule blindé couvert de boue, de branches, de brindilles et de feuilles. Il nous restait une journée à faire dans la brousse, mais on retraitait à la garnison de Petawawa. Je demande à mon chauffeur, surnommé Killer, comment il va réussir à nettoyer le véhicule. Et Killer me répond : « Je vais faire comme d'habitude, monsieur. Je vais emprunter l'aspirateur de ma copine ». Je n'en crois pas mes oreilles. « Vraiment? L'aspirateur de ta copine? » Il renchérit : « Monsieur, il n'y a pas de Shop-Vac au régiment. » Ça faisait quelques mois à peine que j'avais pris le commandement du régiment, alors je n'étais qu'un nouveau venu. Je n'avais pas réalisé qu'on n'avait pas de Shop-Vacs pour nettoyer ces énormes véhicules. J'ai pris mon téléphone, j'ai appelé à la garnison et j'ai demandé qu'on commande un Shop-Vac pour chaque peloton. Ils devaient être là sur le plancher à notre retour le lendemain. Eh bien, le lendemain, il y avait 750 soldats qui ont été accueillis avec des Shop-Vacs flambant neufs. Et ils se sont exclamés : « mon Dieu, mais qui est responsable? » Je leur ai répondu que c'était Killer, parce que Killer avait fourni la recommandation. Tout ce que nous avons à faire en tant que leaders, c'est d'écouter et d'agir.