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Série sur la gouvernance dans un monde complexe : Comprendre ce qu'est la polycrise mondiale (FON1-V45)

Description

Cet enregistrement d'événement explique en quoi consiste une polycrise mondiale, les répercussions d'une telle crise sur les systèmes de gouvernance et ce que cela signifie pour le gouvernement du Canada.

Durée : 01:24:03
Publié : 17 decembre 2024
Type : Vidéo

Événement : Série sur la gouvernance dans un monde complexe : Comprendre ce qu'est la polycrise mondiale (FON1-E30)


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Série sur la gouvernance dans un monde complexe : Comprendre ce qu'est la polycrise mondiale

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Transcription : Série sur la gouvernance dans un monde complexe : Comprendre ce qu'est la polycrise mondiale

[00:00:00 Le logo animé de l'EFPC apparaît à l'écran.]

[00:00:05 Caroline Pitfield apparaît en mode plein écran. Texte à l'écran : Caroline Pitfield, membre-cadre du corps professoral de l'École de la fonction publique du Canada.]

Caroline Pitfield: Bonjour à tous et bienvenue à notre événement d'aujourd'hui intitulé Comprendre ce qu'est la polycrise mondiale. Merci beaucoup de vous être joints à nous aujourd'hui. Je m'appelle Caroline Pitfield et je serai votre modératrice pour la séance d'aujourd'hui.

Avant de commencer, je tiens à rappeler que je m'adresse à vous aujourd'hui à partir du territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinaabe. Je tiens à exprimer ma gratitude à toutes les générations algonquines, passées et présentes, qui sont les gardiens originaux de l'espace que j'occupe aujourd'hui. Je suis très reconnaissante d'être ici. Je reconnais également que des participants de diverses régions du pays se joignent à nous aujourd'hui, et qu'ils peuvent donc se trouver sur un territoire autochtone différent. Je vous encourage à prendre un moment et à réfléchir au territoire que vous occupez.

Alors avant de commencer, une petite question d'ordre administratif. Je tiens à vous informer que nous tiendrons une séance de questions et réponses après avoir entendu notre conférencier aujourd'hui. Je vous invite donc à soumettre vos questions tout au long de l'événement, sans attendre le début de la séance de questions et réponses. Pour soumettre une question, cliquez sur la bulle de clavardage qui est affichée dans le coin supérieur droit de l'interface de webdiffusion. Nous tenterons de répondre au plus grand nombre possible de vos questions aujourd'hui. Nous vous encourageons également à les soumettre dans la langue de votre choix.

J'aimerais maintenant vous présenter notre conférencier.

[00:01:32 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: Le docteur Thomas Homer-Dixon, ou Tad, comme bon nombre d'entre vous le connaissent certainement, est le fondateur et directeur général de l'Institut Cascade de l'Université Royal Roads à Victoria, en Colombie-Britannique. Auparavant, Tad a dirigé le Centre for Peace and Conflict Studies de l'Université de Toronto et a enseigné à l'Université de Waterloo, où; il a fondé le Waterloo Institute for Complexity and Innovation.

Il est l'un des plus éminents intellectuels publics du Canada, et un auteur à succès qui possède une grande expertise en matière de menaces pour la sécurité mondiale au 21e siècle. Pour ceux et celles d'entre vous qui pourraient être intéressés, son œuvre la plus récente s'intitule Commanding Hope: The Power We Have to Renew a World in Peril. Elle a été publiée en 2020. Aussi, ses écrits sont largement diffusés dans les médias, notamment le Globe and Mail, Foreign Affairs Magazine, Foreign Policy, Scientific American, le New York Times, le Washington Post et le Financial Times.

Expert recherché, surtout en ces temps complexes, Tad a donné des séances d'information au Bureau du Conseil privé, au ministère des Affaires étrangères, au ministère de la Défense, ainsi qu'à des bureaux au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Bienvenue, Tad, et merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui.

[00:02:45 Le Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran. Texte à l'écran : Thomas Homer Dixon; directeur général, Institut Cascade, Université Royal Roads, Colombie-Britannique. / Directeur general, Institut Cascade, Université Royal Roads, Colombie-Britannique.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Merci beaucoup, Caroline, et bienvenue à tous. C'est vraiment formidable d'avoir l'occasion de vous parler un peu des travaux de l'Institut Cascade sur la question de cette polycrise actuelle. J'imagine que vous avez déjà entendu cette expression, mais il est fort possible qu'elle soit plutôt vague pour vous, que son sens exact ne vous soit pas familier.

[00:03:07 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive titre. Texte sur la diapositive : Institut Cascade; Polycrisis; Current Research, Future Directions. / Cascade Institute; Polycrise; Recherche actuelle, orientations futures.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Aujourd'hui, j'espère pouvoir démystifier cette expression pour vous, et ensuite vous présenter le cadre de réflexion sur la nature de la polycrise que nous avons élaboré à l'Institut Cascade. L'Institut Cascade est à la fois un groupe de réflexion et un groupe d'action. Nous sommes tout particulièrement intéressés à cerner des connaissances, en particulier en provenance des sciences de la complexité, pour les appliquer à la résolution de problèmes concrets dans le monde afin d'aider les décideurs politiques, les communautés, les entreprises et d'autres parties intéressées qui tentent de faire face à nos problèmes complexes, soit en renforçant nos capacités de prévoyance, soit en identifiant ce que nous appelons des points d'intervention à effet de levier important, c'est-à-dire des points d'intervention qui permettant d'investir des ressources pour mettre la planète sur une meilleure trajectoire. Passons à la diapositive suivante.

[00:03:54 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, dans le cadre de notre programme de recherche sur la polycrise, qui est l'un de nos trois grands programmes de recherche à l'Institut Cascade, nous avons posé cette question fondamentale – pourquoi tant de dysfonctionnements surviennent-ils en même temps dans le monde? Je pense que nous nous posons tous cette question, à un degré ou un autre. Au cours de la dernière demi-douzaine d'années, nous avons connu une pandémie; nous constatons la montée de l'autoritarisme politique; des événements météorologiques extrêmes causent d'énormes dommages; nous avons connu une explosion de l'inflation, des guerres ont éclaté dans différentes régions critiques du monde et nous constatons une recrudescence des conflits partout dans le monde. Tous ces événements contribuent à changer la trajectoire de la planète généralement plus pacifique que nous connaissions au cours des décennies précédentes.

Il semble bien que quelque chose se passe, quelque chose de nouveau, et nous voulons mieux comprendre ce que c'est. Et nous voulons utiliser nos outils d'étude de la complexité pour tenter d'expliciter les mécanismes sous-jacents. Passons à la diapositive suivante.

[00:04:53 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : A l'Institut Cascade, nous avons une équipe qui travaille sur cette question. Comme vous pouvez le voir ici, des gens en provenance de milieux très diversifiés, qui vont des relations internationales jusqu'aux neurosciences. Tous ces gens travaillent ensemble pour essayer de comprendre les mécanismes sous-jacents. Diapositive suivante.

[00:05:13 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Et nous collaborons avec des instituts et d'autres groupes de recherche dans le monde entier, en particulier le Potsdam Climate Centre, qui est le principal groupe de recherche sur le climat en Allemagne, et qui compte également parmi ses collaborateurs une forte concentration de chercheurs spécialisés dans les systèmes complexes. C'est le « PIK » que l'on peut voir ici.

Le Research Institute for Sustainability, le RIFS, également à Potsdam, et le Centre for the Study of Existential Risk. Et aussi, nous travaillons en étroite collaboration avec des gens de l'Université de Cambridge. Diapositive suivante.

[00:05:47 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, l'expression « polycrise » est utilisée depuis environ 20, 25 ans , comme vous le verrez dans un instant. C'est une expression utile. En examinant son taux d'utilisation au cours des cinq dernières années dans ce modèle de n-grammes généré par Google, vous pouvez constater qu'il était très peu utilisé. En bas ici, la polycrise est la ligne rouge. Et vers la fin de 2021, Adam Tooze, qui est historien de l'économie à l'Université Columbia, a publié un billet dans son blogue Substack. Et ce billet a reçu beaucoup d'attention à ce moment-là.

Et puis au début de 2023, vous pouvez voir ce pic soudain. Alors, le billet d'Adam Tooze est publié vers la fin de 2022, puis au début de 2023 il y a une hausse marquée de la ligne rouge. Cette hausse correspond à la réunion du Forum économique mondial à Davos, en Suisse, où; l'expression est devenue le néologisme du jour. C'est un concept qui a été largement utilisé pendant cette conférence, et son utilisation a généré pas mal de discorde. Les participants ne s'entendaient pas à savoir si un tel concept était utile ou non.

Vous pouvez aussi constater que l'utilisation de cette expression a parfois dépassé celle du concept de risque systémique, qui correspond à la ligne orange ici; ce concept est beaucoup plus fréquemment utilisé dans les cercles financiers, par exemple. Et le pic marqué dans l'utilisation du concept de risque systémique survient plus tard en 2022, avec la faillite de la Silicon Valley Bank en Californie. Diapositive suivante.

[00:05:47 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Comme je l'ai dit, l'utilisation du concept remonte à plus de 20 ans. Il avait été créé par un célèbre chercheur et philosophe français, un spécialiste de la complexité, du nom d'Edgar Morin, dans un livre qu'il a co-écrit avec Anne Brigitte Kern en 1999. Le concept a ensuite été repris par un spécialiste des sciences sociales sud-africain bien connu, Mark Swilling, vers 2013.

Mais son usage a beaucoup augmenté en 2018 après que le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, eut déclaré que l'Europe était confrontée à une polycrise. En évoquant la juxtaposition de la crise financière, du Brexit et de la crise migratoire, tout particulièrement à la suite de la guerre civile en Syrie.

Il avait affirmé que l'Europe était frappée simultanément par toutes ces choses. Et ainsi, c'était la première fois que le concept était largement utilisé. Puis plusieurs groupes ont commencé à l'utiliser, et notamment l'Institut Cascade. Comme je l'ai mentionné, Adam Tooze a contribué à diffuser plus largement ce concept vers 2021, 2022, puis il a été mentionné au Forum économique mondial. Son utilisation a vraiment explosé à partir de cet événement. Et maintenant, ça revient assez régulièrement dans les conversations sur l'état du monde.

À dire vrai, je n'ai pas une très grande appréciation pour cette appellation, « polycrise », même si nous en sommes venus, ici à l'Institut Cascade, à ancrer une bonne partie de nos propres recherches dans ce terme, et alors que nous essayons de mieux le comprendre. J'aurais aimé que nous utilisions plutôt une expression ne me fait pas penser constamment à des perroquets [en anglais], mais bon. Alors voilà pour ce qui est du concept. Il semble avoir trouvé écho, et les gens l'utilisent maintenant largement, alors il est là pour rester. Diapositive suivante, s'il vous plaît.

[00:09:36 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Alors, qu'est-ce que c'est que cette chose qu'on appelle une polycrise? Il nous faut combler cette lacune, une lacune sémantique, et lui associer un peu de contenu utile.

Passons à la diapositive suivante.

[00:09:59 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Nous définissons une polycrise ainsi : « Une polycrise survient lorsque des crises présentes au sein de systèmes mondiaux multiples deviennent suffisamment enchevêtrées dans une relation de causes à effets pour causer un préjudice humain majeur. Les interactions entre les crises individuelles sont suffisamment importantes pour induire des préjudices émergents qui sont différents de ceux générés par ces crises, et habituellement plus dommageables que la somme des préjudices que ces crises produiraient séparément. » Vous noterez ces deux sections mises en gras. Le concept d'enchevêtrement et le concept d'émergence. Ce sont les deux concepts dont j'aimerais maintenant parler.

Le premier concept évoque l'idée que ces crises ne sont pas réellement indépendantes les unes des autres. Le fait qu'elles produisent toutes en même temps ne peut être attribuable à une simple coïncidence. Ce n'est pas un exemple de tempête parfaite, dans laquelle, si on attend assez longtemps, les choses vont s'améliorer d'elles-mêmes. Il semblerait que c'est simplement un accident de l'histoire qui explique que tous ces dysfonctionnements surviennent en même temps. Mais en fait ils sont interreliés, et peut-être même se renforcent-ils mutuellement d'une façon ou d'une autre, comme je l.expliquerai dans un instant.

La seconde partie de cette définition. Oups. Restons sur cette diapositive encore un moment. La seconde partie de la définition porte sur cette notion d'émergence, qui est une idée clé dans la science de la complexité.

C'est l'idée que « plus » se traduit par « différent ». C'est l'idée qu'en augmentant le nombre d'unités ou d'éléments dans un système, on passe éventuellement d'un changement quantitatif à un changement qualitatif. Voici une autre façon d'appréhender ce phénomène : lorsque vous combinez ces crises ensemble, elles font quelque chose en combinaison que vous ne pouvez pas voir en examinant individuellement chacune des crises, il y a quelque chose de nouveau qui colore l'ensemble du système, la somme de toutes ces crises. Et dans le présent cas, nous proposons que la nouveauté produit des préjudices qui sont plus importants que ce qui serait produit si toutes ces crises évoluaient entièrement indépendamment les unes des autres.

Donc, c'est cette idée que quelque chose de nouveau survient lorsque tout est combiné, et que nous devons tenter de le comprendre dans son ensemble plutôt que de considérer simplement ses éléments séparés. Et c'est extrêmement important pour les politiques publiques, parce que dans ce domaine, nous avons tendance justement diviser les choses en éléments séparés et à examiner chaque élément séparément avant de tout regrouper. Dans le cas de la polycrise, il faut absolument considérer l'ensemble du problème dès le départ, sinon nous allons manquer des choses d'une importance vitale. Passons à la diapositive suivante.

[00:12:33 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, pour solutionner ce problème, nous devons comprendre ce qui se passe en termes de connexions de cause à effet. Donc, la causalité est un concept fondamental qui est jugé essentiel par l'Institut Cascade. Nous posons toujours cette question : comment fonctionne la causalité? Dans le contexte de la polycrise, notre objectif a donc été d'essayer de comprendre ces mécanismes sous-jacents de causalité. Passons à la diapositive suivante.

[00:13:03 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Alors, voici maintenant un exemple de tentative de compréhension de tels mécanismes de causalité. Cette diapositive a été créée par Adam Tooze en juin 2022, comme vous pouvez le voir dans le coin supérieur droit. Il essayait de comprendre les liens entre ce qui se passait en Ukraine – la guerre avec la Russie – et les changements climatiques; les effets d'entraînement; les effets en aval de la pandémie; des choses qui semblaient toutes liées d'une manière ou d'une autre. C'est une de ces situations que l'on appelle parfois « le dos de l'enveloppe ». C'est là que tout le monde commence toujours lorsqu'il s'agit d'expliciter ces liens. C'est un diagramme très utile. À première vue le temps se déroule de gauche à droite dans ce diagramme, cependant vous noterez ces flèches qui pointent dans l'autre sens. C'est l'une des choses qui compliquent la compréhension de ce diagramme particulier.

Dans nos recherches, nous faisons la distinction entre deux types de représentation par diagramme. Tout d'abord, ce que nous appelons un diagramme à dominos, dans lequel le temps s'écoule de gauche à droite, et où; nous pouvons mesurer une progression, et les flèches pointent toujours de gauche à droite et elles peuvent pointer du passé vers le futur. Un diagramme à dominos vous permet de faire des projections vers le futur. Nous l'appelons ainsi parce qu'il évoque des dominos qui tombent les uns après les autres. Et ensuite, un diagramme en boucle, la seconde catégorie que nous utilisons, qui se compose de boucles à renforcement mutuel. J'aurai beaucoup d'occasions de parler de boucles au cours de cette présentation, et tout particulièrement de boucles de rétroaction.

Dans le cas présent, il semble que M. Tooze ait combiné les deux types de diagramme, et cela donne lieu à un certain niveau de confusion au plan conceptuel. Mais néanmoins, je pense que ce diagramme était une bonne première étape pour tenter d'expliciter les relations entre la pandémie, la guerre et les changements climatiques. Je crois que la prochaine diapositive est la version française, alors affichons-la maintenant pour que les gens puissent la voir.

[00:14:59 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, ceci était la tentative de M. Tooze de comprendre les liens entre différentes crises dans le monde. Ensuite une autre organisation, puis de nombreuses autres dans le monde, ont tenté d'examiner ces liens, elles aussi. La plus célèbre d'entre elles est très certainement le Forum économique mondial. Le Forum produit chaque année un rapport nommé Rapport annuel sur les risques mondiaux.

L'une des premières actions de notre équipe à l'Institut Cascade a été d'examiner tous ces rapports sur les risques publiés depuis 2006 afin de comprendre comment progresse au fil du temps la compréhension des liens entre différentes choses qui se produisent dans le monde et les risques qui se manifestent sur la planète. Voici un exemple de diagramme produit par le Forum en 2007. Vous pouvez voir, en périphérie, un grand nombre de problèmes ou défis auxquels l'humanité est confrontée, qui sont reliés les uns avec les autres par des lignes de différentes épaisseurs. Le Forum économique mondial avait demandé à différents experts du monde entier de lui indiquer ce qu'étaient, selon eux, les menaces importantes pour l'humanité, et quelles étaient selon eux les relations entre ces menaces. Par la suite, le Forum a regroupé l'information recueillie dans ce diagramme.

C'est une représentation utile, mais je ne pense pas qu'elle nous en dise beaucoup. Ce que je veux dire, c'est un peu comme de comparer des pommes à des oranges, quand on observe tous ces facteurs disparates en périphérie. On ne perçoit pas de liens évidents entre eux. Certains sont des événements de courte durée; et d'autres sont des tensions à long terme. Je vais expliciter dette distinction dans un instant. Si j'étais le dirigeant d'une grande entreprise ou un décideur qui était confronté à un diagramme comme celui-ci, et si je disais, « Eh bien, ceci nous dit simplement qu'il y a beaucoup de choses désagréables dans le monde en ce moment. » Ça ne nous aiderait pas vraiment à mieux comprendre le problème. Passons à la diapositive suivante.

[00:16:45 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon :  Mais le Forum économique mondial l'a fait avec succès, et chaque année par la suite. Continuant jusqu'à celui pour 2022, on peut voir que leur présentation s'améliore, mais je ne pense pas qu'ils soient nécessairement plus informatifs. Les graphismes ont évolué, mais je ne pense pas que celui-ci en particulier nous aide beaucoup au plan analytique. Pourtant il y a eu une période, vers le milieu des années 2010, pendant laquelle le Forum a réellement tenté de décoder certaines des boucles que j'ai évoquées précédemment, tout particulièrement les boucles de rétroaction. En fait, c'est une Canadienne qui a dirigé cet effort de compréhension. Kristel Van der Elst dirigeait à l'époque le groupe d'évaluation des risques du Forum économique mondial; elle est maintenant directrice générale de l'organisme Horizons de politiques Canada à Ottawa. Donc, beaucoup de talent et d'expertise ainsi ramenés au Canada. Après son passage au FEM, Mme Van der Elst est retournée à des représentations moins utiles sur le plan analytique, dans mon opinion, pour représenter les connexions entre les différents risques auxquels l'humanité est confrontée.

Au cours des deux dernières années, et nous avons ici les diapositives pour 2022 et 2023, le Forum économique mondial a recommencé à produire des diagrammes un peu plus utiles. Diapositive suivante, s'il vous plaît.

[00:18:07 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Au cours de nos recherches à l'Institut Cascade, nous avons essayé d'adopter cet angle d'analyse pour essayer de cerner, en quelque sorte, une façon radicalement différente de conceptualiser les relations entre les causes constitutives de la polycrise de manière à nous aider à mieux comprendre les choses. Nous avons donc laissé de côté, par exemple, les travaux du Forum économique mondial et des diverses sociétés de réassurance, de BlackRock et d'autres qui ont travaillé dans ce domaine, comme l'Autorité des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe. Beaucoup ont mené un type ou un autre d'analyse des risques, Mais nous avons élaboré notre propre approche. Diapositive suivante, s'il vous plaît.

[00:18:50 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Et cette approche a été articulée pour la première fois dans l'article qui a été publié par Cambridge University Press plus tôt en 2024.

Et pour ce qui est de son contenu de base – revenons un instant à la diapositive précédente, la diapositive en anglais. Le contenu de base de ce modèle, c'est cette relation entre les tensions, les déclencheurs et les crises. Donc, les tensions sont des processus à long terme qui s'exercent souvent au niveau mondial. On peut penser par exemple au réchauffement climatique, aux changements démographiques, à l'élargissement des écarts de revenus entre les riches et les pauvres, aux migrations à grande échelle. Toutes ces choses se déroulent à très grande échelle. Ce sont des processus lents. Comme ils se déroulent sur de longues périodes et que nous avons tendance à en savoir beaucoup sur eux, ils sont donc plus ou moins prévisibles, et vous pouvez projeter leurs tendances futures dans le temps. Les déclencheurs, quant à eux, sont des processus rapides. Ils peuvent se produire rapidement. En comparaison des tensions, qui peuvent se déployer sur des années ou même des décennies, les déclencheurs peuvent survenir en quelques minutes ou même en quelques secondes. Un événement comme un assassinat, ou la faillite d'une grande société en une semaine, ou encore une sécheresse sur plusieurs semaines, une vague de chaleur ou une tempête exceptionnelles. Ce sont des choses qui se déroulent pendant des périodes beaucoup plus courtes. Les déclencheurs ont tendance à survenir dans des zones localisées, dans des espaces géographiques relativement restreints. Et ils sont largement stochastiques. En d'autres termes, ils ont un caractère purement aléatoire. Ils sont extrêmement difficiles à prévoir, tandis que les tensions sont beaucoup plus faciles à prévoir.

Maintenant, le signe de multiplication au milieu de ce cercle indique que vous devez combiner les tensions et les déclencheurs pour produire une crise. Vous pouvez penser à ce signe de multiplication comme représentant, pour ceux d'entre vous qui connaissent les statistiques, un opérateur booléen. Vous avez donc besoin à la fois de tensions et de déclencheurs. La présence des deux est une condition obligatoire pour produire une crise. Si l'un ou l'autre n'est pas présent, alors vous n'aurez pas votre crise. Ensuite, une crise, nous la comprenons comme un phénomène de type particulier. Une crise est un moment d'instabilité, une période de déséquilibre dans un système. Passons à la diapositive suivante, celle du diagramme en français. Je vous laisse en prendre connaissance pendant une seconde, et ensuite nous allons continuer. Et je ne savais pas que « trigger » est traduit par « déclencheur » en français. Il faudra que je me souvienne de ça.

[00:21:25 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Voici donc une façon de conceptualiser cette relation entre les tensions, les déclencheurs et les crises avec un modèle utilisé par les chercheurs en complexité, que nous appelons un « paysage stable » ou « paysage à énergie minimale ».

Vous pouvez vous représenter l'état d'un système donné, par exemple un système climatique, un système économique ou un système politique, comme un ballon, Par exemple ce ballon rouge ici dans un paysage. Normalement, le ballon roulerait vers l'un des bassins dans le paysage. Nous appelons ces éléments des bassins d'attraction. Dans ces bassins, le niveau d'énergie est minimal. Le ballon est confortable dans un bassin d'attraction. Il n'a pas à déployer des efforts pour y demeurer. Il reste en place simplement en raison du fait qu'il est déjà au creux du bassin. Et cette image représente comment, à l'intérieur d'un système économique ou d'un système politique ou d'un système climatique, il existe des mécanismes qui stabilisent le système, qui le maintiennent dans un certain état d'équilibre. Nous appelons ces mécanismes des systèmes homéostatiques.

Alors, l'action des tensions dans un tel système, c'est de remplir ce bassin d'attraction au fil du temps. Elles le rendent de moins en moins profond. Ainsi, il devient de plus en plus facile pour des déclencheurs d'importance comparativement de plus en plus faible de faire basculer le système dans un état instable, dans notre exemple ici entre deux bassins, au sommet d'une crête, d'où; il peut aisément revenir à la position qu'il occupait auparavant, ou passer dans un tout nouvel équilibre qui pourrait produire des résultats très différents pour les sociétés concernées. Et c'est ce moment de déséquilibre, cette instabilité, que nous interprétons comme une crise. Et avec la polycrise actuelle, nous croyons que nous assistons à la combinaison de multiples moments d'instabilité.

Donc, les tensions, je le rappelle, rendent un système moins résilient au fil du temps. Et les déclencheurs sont des événements stochastiques ou aléatoires qui font basculer le système de son équilibre actuel vers un autre équilibre. De toute évidence, si nous voulons vraiment comprendre ce qui se passe avec la polycrise, nous devrions passer beaucoup de temps à examiner les tensions, puisque les tensions sont les processus sous-jacents qui modifient les résultats probables dans nos environnements. Diapositive suivante, s'il vous plaît. Jetons maintenant un coup d'œil à la version française du diagramme.  Sur le plan conceptuel, ce diagramme représente vraiment le cœur de notre modèle. Et il semble fort simple, mais en fait c'est un très puissant moteur d'analyse. Diapositive suivante, s'il vous plaît.

[00:23:58 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive. Texte sur la diapositive : Les tensions comprennent : 1. Réchauffement climatique 2. Perte de biodiversité et dégradation écologique 3. Maladies virales zoonotiques, résistance microbienne 4. Divergences démographiques (notamment le vieillissement de la population) 5. Uniformité élevée et interconnectivité de l'approvisionnement alimentaire mondial 6. Diminution de la densité de puissance des ressources énergétiques 7. Uniformité élevée et interconnectivité du système financier mondial 8. Ralentissement de la croissance économique, élargissement des inégalités économiques 9. Polarisation idéologique et fragmentation épistémique 10. Propagation de l'idéologie populiste autoritaire 11. Développement des IA fondées sur les grands modèles de langage 12. Transition hégémonique des grandes puissances./Les contraintes comprennent: 1. réchauffement climatique 2. perte de biodiversité et degradation écologique 3. maladies virales zoonotiques, resistance microbienne 4. divergence démographique (y compris le vieillissement de la population) 5. grande uniformité et connectivité de l'approvisionnement alimentaire mondial 6. baisse de la densité de puissance des sources d'énergie 7. grande uniformité et connectivité du système financier mondial 8. ralentissement de la croissance économique , aggravation des inégalités économiques 9. polarisation idéologique et fragmentation épistémique 10. propagation de l'idéologie populiste et autoritaire 11. propagation d'un grand modèle linguistique IA 12. transition hégémonique des grandes puissances ]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, les tensions que nous examinons dans le monde forment cette liste d'environ une douzaine. Nous travaillons en ce moment à finaliser cette liste et à nous assurer que nous faisons ce que les philosophes appellent « sculpter la réalité à ses points de connexion » avec efficacité. Ces différentes tensions se chevauchent beaucoup, comme vous pouvez le voir. Elles influent énormément les unes sur les autres. L'inclusion ou la non-inclusion de l'une d'elles sur la liste relève quelque peu de l'arbitraire. Chaque groupe a élaboré sa propre liste. En ce moment, nous consacrons du temps à ce que nous appelons une analyse globale des tensions, qui consiste à analyser avec soin ce que nous allons inclure dans la liste, afin de nous assurer qu'elle est exhaustive. Retournons un moment à la diapositive en français. Je ne vais pas en parler en détail. Lorsque je fais une version élargie de cette présentation, j'examine plus en détail chacune de ces tensions, mais je pense que la plupart d'entre vous en reconnaîtraient la majorité et comprendraient l'importance fondamentale de chacune.

Je veux néanmoins en mentionner une ici, le numéro huit, « Ralentissement de la croissance économique et élargissement des inégalités économiques », simplement parce que je pense qu'un changement fondamental est survenu, tout particulièrement dans les économies modernes; un changement qui n'est pas largement reconnu, et qui contribue par exemple à la montée de l'autoritarisme populiste dans les sociétés occidentales. Passons à la diapositive suivante, puis au tableau.

[00:25:25 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Ce graphique, fondé sur des données de la Banque mondiale, représente la croissance économique. On y voit le taux de croissance du PIB par habitant dans les pays à revenu élevé depuis environ 1960 jusqu'à aujourd'hui. Ce qui est intéressant dans ce graphique en particulier, c'est que j'ai demandé à mon équipe d'extraire toutes les périodes pendant lesquelles il y avait une forte volatilité dans le système en raison d'événements comme la guerre de Yom Kippour, ou plus récemment la pandémie, qui étaient des chocs externes ou exogènes au système et qui, par conséquent, perturbaient ou déformaient le signal. Lorsque nous éliminons ces variations, nous pouvons constater qu'il y a eu une baisse vraiment remarquable du taux de croissance économique. Le R au carré affiché dans le coin supérieur droit est de près de 0,6, ce qui en fait est extraordinairement élevé pour tout ce qui touche aux sciences sociales.

Le déclin de la croissance économique sur une période de plusieurs décennies dans les économies modernes est incontestablement l'un des moteurs des dissensions croissantes au sein des économies, parce que, entre autres choses, il a fait en sorte que des groupes riches et des groupes privilégiés ont accaparé une part croissante d'un gâteau économique dont taille augmente de moins en moins rapidement. Et alors que ce gâteau économique augmentait de plus en plus lentement, il y avait une concurrence croissante pour les parts du gâteau. Et l'un des résultats est la stagnation, voire la baisse, des revenus d'une partie importante de nos sociétés. Et nous savons quelles en ont été les conséquences politiques. Diapositive suivante. Donc, ceci est la version en français. Passons à la diapositive suivante.

[00:27:21 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, notre argument, à l'Institut Cascade, est que l'on constate que les tensions mondiales et les crises qu'elles provoquent sont actuellement en voie d'amplification, d'accélération et de synchronisation. Je vais prendre quelques minutes pour expliquer ce que nous entendons par ces concepts. Diapositive suivante. Et la diapositive suivante.

[00:27:40 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Je vais commencer par me concentrer sur l'amplification et l'accélération, et ensuite je parlerai un peu de la synchronisation. Diapositive suivante. Et la diapositive suivante.

[00:27:54 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, pour ce qui est de l'amplification et de l'accélération, j'utiliserai l'exemple du réchauffement climatique. Nous pourrions le faire pour chacune des tensions sur cette liste, mais pour la plupart d'entre elles les phénomènes d'amplification et d'accélération sont similaires. Dans le cas du réchauffement climatique, nous avons constaté une amplification du problème, en ce sens où; il s'est aggravé. Vers 2000, la température troposphérique, celle mesurée à la surface de la planète, était d'environ 0,7 degré plus élevée que celles mesurées avant la période industrielle. Et maintenant, il fait plus de 1,3 degré de plus, tout dépendant de la méthode utilisée pour calculer la moyenne des chiffres au cours des années; nous avons déjà considérablement excédé 1,2, et peut-être même 1,5, mais le chiffre habituellement proposé est d'environ 1,3, 1,35. Il y a donc eu une aggravation importante du problème, le réchauffement étant passé de 0,7 degré Celsius à 1,35 depuis les températures mesurées avant l'industrialisation au 19e siècle.

Mais aussi, il y a eu également une accélération du réchauffement. En d'autres termes, la température mondiale augmente de plus en plus rapidement. Entre 1970 et 2010, le réchauffement par décennie a été d'environ 0,18 degré Celsius. Entre 2010 et 2040, on estime que le réchauffement par décennie sera d'environ 0,3 degré. Donc, un taux de réchauffement presque 80 % plus élevé, de 70 à 80 % plus élevé. Donc, les choses s'aggravent plus rapidement. L'un des facteurs à l'origine de ce réchauffement est la modification de l'équilibre radiatif de la planète. Diapositive suivante, s'il vous plaît. Diapositive suivante.

[00:29:39 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Faisons une pause ici un instant. Voici l'équilibre énergétique de la Terre, ou plutôt son déséquilibre énergétique. C'est essentiellement la différence entre la quantité d'énergie qui atteint la surface de la planète depuis le soleil et la quantité d'énergie qui est réfléchie par cette surface dans l'espace. Normalement, la Terre devrait être en équilibre. La même quantité d'énergie devrait y entrer et en sortir. Mais parce que nous avons changé l'opacité de l'atmosphère au rayonnement infrarouge, plus d'énergie entre qu'il n'en sort. Entre 2005 et 2015, le déséquilibre était d'environ 0,7 watt par mètre carré. Plus récemment, il a plus que doublé pour atteindre environ 1,35 watt par mètre carré.

Cela ne semble peut-être pas être une différence d'énergie appréciable, mais lorsque vous agrégez ces valeurs pour la totalité des mètres carrés à la surface de la planète, la valeur du déséquilibre énergétique est maintenant supérieure à 1 million de bombes de la taille de celle d'Hiroshima qui explosent chaque jour dans l'atmosphère. C'est la quantité d'énergie qui serait libérée si vous faisiez exploser un million de bombes atomiques dans l'atmosphère tous les jours, jour après jour. Et toute cette énergie accélère la vitesse du cycle hydrologique à la surface de la planète. C'est-à-dire le cycle de l'eau entre la surface de la planète et l'atmosphère, puis de nouveau jusqu'à la surface de la planète.

Ce qui signifie que vous avez des sécheresses plus intenses, des tempêtes plus importantes, comme nous l'avons vu partout dans le monde récemment. Et c'est un peu comme je le dis parfois, nous avons créé un léviathan sur la planète, une bête massive, et chaque année, nous y injectons plus d'énergie et il devient plus destructeur. Et tant et aussi longtemps que ce déséquilibre énergétique demeurera, le problème du réchauffement mondial s'aggravera. Diapositive suivante, s'il vous plaît.

[00:31:33 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Pour vous représenter plus aisément l'amplification et à l'accélération, pensez à une fonction d'onde. Et on peut penser qu'avec le temps, nos crises deviennent de plus en plus graves et fréquentes. Vous pouvez voir, au bas de la diapositive, la liste des maladies virales zoonotiques de l'Organisation mondiale de la santé. Au début, il semble y avoir de grands écarts entre leurs apparitions. Pandémies, ou éclosions majeures de maladies virales zoonotiques; VIH, 1980; SRAS, 2002; et à la fin de la séquence, il semble qu'elles se produisent beaucoup plus souvent et que les conséquences semblent plus graves.

Donc, vous obtenez une compression de la fréquence, comme vous pouvez le voir dans la fonction d'onde, et donc une amplification de la gravité des crises qui en résultent. C'est une métaphore utile pour réfléchir à l'amplification et à l'accélération. Diapositive suivante, s'il vous plaît. Et la diapositive suivante.

[00:32:42 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Mais ce qui nous préoccupe le plus à l'Institut Cascade, c'est la synchronisation des crises. Et c'est vraiment là que nous concentrons notre attention. Diapositive suivante, s'il vous plaît. Diapositive suivante.

[00:33:01 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Pour vous représenter ce concept, pensez à des métronomes qui sont hors séquence puis qui, avec le temps, se synchronisent les uns avec les autres. Je vous exhorte, si vous le pouvez, à jeter un coup d'œil à quelques vidéos en ligne illustrant ce phénomène. C'est vraiment remarquable. Si vous placez des métronomes sur un type particulier de plate-forme, vous pouvez les démarrer avec le même tempo, mais à des moments différents, afin qu'ils ne soient pas en séquence. Et puis, avec le temps, ils vont tous commencer à se synchroniser les uns avec les autres parce que la plate-forme transmet un signal, essentiellement de petites quantités d'énergie qui encouragent tous les métronomes à tiquer dans une même séquence les uns avec les autres. Donc, ils deviennent tous synchronisés. C'est tout à fait remarquable.

Dans le cadre de nos travaux, nous recherchons les mécanismes qui permettent à des systèmes de communiquer entre eux afin de se synchroniser mutuellement. Diapositive suivante.

[00:34:00 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Parlons maintenant de la façon dont cela pourrait se produire, de la façon dont la synchronisation pourrait se produire. Nous avons ici deux systèmes génériques. Nous pourrions avoir un système économique, un système climatique, un système économique et un système de santé, par exemple. Et il existe diverses façons par lesquelles les tensions et les déclencheurs de chacun de ces systèmes peuvent se connecter les uns aux autres. Diapositive suivante.

[00:34:23 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : En ce moment, ils ne sont pas connectés, mais il est possible, comme vous le voyez ici, que les tensions dans un système puissent affecter les tensions dans un autre. Diapositive suivante. Voilà la version en français.

[00:34:34 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Il est également possible que les tensions dans l'un affectent les déclencheurs dans un autre. Diapositive suivante.

[00:34:45 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Et les crises dans un système pourraient affecter à la fois les tensions et les déclencheurs dans un autre. Diapositive suivante. Diapositive suivante.

[00:34:55 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Et les crises des deux systèmes pourraient se répercuter les unes sur les autres. Voici diverses combinaisons de tensions, de déclencheurs et de crises entre deux systèmes. Nous appelons cela une grammaire des interactions intersystémiques possibles. Et nous pouvons utiliser ces outils pour comprendre comment deux systèmes s'affectent l'un l'autre pour commencer à synchroniser leurs comportements de la même manière que des métronomes. Diapositive suivante.

[00:35:21 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Je vais vous donner un exemple ici. Ici, nous avons le système un. C'est quelque chose que nous avons vu, un exemple très simplifié, mais néanmoins, cela illustre la synchronisation. Ici, nous avons une tension, soit une connectivité accrue entre les communautés humaines à cause des voyages et autres raisons. Et puis vous avez peut-être un accident dans un laboratoire où; des virus sont libérés, comme nous l'avons vu à Wuhan en Chine. Ensemble, les deux éléments contribuent à une pandémie. Aujourd'hui, bien sûr, bien d'autres choses entrent dans la constitution d'une pandémie, mais ceux-ci sont deux facteurs essentiels. Ce sont tous deux des conditions nécessaires, une tension et un déclencheur. Diapositive suivante. Donc, ceci est la version en français.

[00:35:58 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Nous allons maintenant introduire un deuxième système, le système de soins de santé, qui, par exemple, au Canada et dans de nombreux autres pays, souffrait d'un sous-financement chronique. Diapositive suivante.

[00:36:12 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : La pandémie a ensuite contribué un déclencheur qui, combiné au sous-financement chronique des soins de santé, a provoqué l'épuisement professionnel des travailleurs de la santé. Les deux choses se sont combinées. Diapositive suivante.

[00:36:28 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Les deux éléments combinés ont engendré une crise systémique des soins de santé. Donc, on voit ici que la pandémie aggrave les problèmes au sein du système de santé en produisant un déclencheur particulier, en produisant une crise systémique des soins de santé. Diapositive suivante.

[00:36:42 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Ce qui a ensuite aggravé la pandémie. Et nous avons vu ce processus se dérouler en temps réel au Canada, par exemple, et partout dans le monde. Nous voyons ici la synchronisation de deux systèmes par ailleurs relativement indépendants en raison des connexions entre eux. Diapositive suivante.

[00:37:02 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Donc, cela vous donne une idée de la façon dont nous voyons le fonctionnement des mécanismes causaux de la polycrise dans notre recherche. J'ai mentionné que nous avons entrepris une analyse globale des tensions systémiques. Et pendant la conversation dans quelques minutes, je pourrai parler un peu de la méthode particulière que nous utilisons, qui est l'analyse de l'équilibre entre impacts croisés, qui est une façon d'obtenir une compréhension quasi quantitative des interactions, qui nous permet de déterminer où; se trouvent les zones de stabilité, et peut-être des voies par lesquelles nous pouvons éviter de très mauvais résultats avec la polycrise.

J'espère donc avoir un moment pour parler un peu plus de ce que nous appelons l'analyse de l'équilibre entre impacts croisés. Diapositive suivante. Et la diapositive suivante.

[00:37:52 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Et quelques mots à la fin sur certaines des ressources si vous voulez en savoir plus sur ce que nous faisons, comprendre plus en profondeur le modèle que nous élaborons et comment nous l'appliquons. Diapositive suivante.

[00:38:09 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Nous avons en ligne cette introduction à l'analyse de la polycrise, qui donne l'histoire complète de ce que nous appelons le modèle STC pour Stress Trigger Crisis, que je viens de vous présenter. L'introduction montre comment nous appliquons ce modèle dans différents cas et explique comment modéliser des systèmes et utiliser les cartes des systèmes que nous utilisons à l'Institut Cascade. Diapositive suivante.

[00:38:41 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Sur le site polycrisis.org, vous trouverez une énorme quantité d'informations, très soigneusement sélectionnées et organisées, pour vous tenir informés des plus récentes conversations sur la polycrise. Commentaires, critiques, documents de recherche et autres, tous organisés dans un moteur de recherche afin que vous puissiez trouver des enjeux spécifiques vraiment, vraiment facilement. Il y a un parcours d'apprentissage organisé autour de questions clés qui vous permet de comprendre l'ensemble de la conversation très rapidement. Et puis il y a une carte communautaire qui montre tous les groupes, les personnes et les organisations qui travaillent sur les enjeux de la polycrise à travers le monde, et les connexions entre eux.

[00:39:21 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Nous avons produit un rapport sur les parcours positifs. Il n'y a pas seulement du négatif dans nos constatations. On pourrait soutenir que la polycrise crée également des possibilités de changements positifs rapides amenant à la création de réformes dans certains des systèmes sous-jacents, ou pour répondre à certaines des tensions profondes qui sont à l'origine de la polycrise. Ces possibilités, et comment nous pouvons les envisager, sont décrites dans le rapport sur les parcours positifs. Diapositive suivante.

[00:39:54 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Nous avons publié récemment, début octobre, une évaluation des risques intersystémiques mondiaux associés à une seconde présidence Trump. En fait, aujourd'hui ou demain, nous procédons à une mise à jour de ce rapport qui sera publié sur notre site Web. Nous utilisons différents outils, l'analyse de boucles, l'analyse de boucles causales, le modèle STC, et ce que nous appelons l'analyse des jonctions causales, et nous les appliquons pour essayer de comprendre très précisément les divers risques qu'une deuxième présidence Trump pourrait produire et les implications mondiales de ces risques, y compris les boucles de rétroaction potentielles qu'une deuxième présidence Trump pourrait induire. Diapositive suivante.

[00:40:39 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Pour ce qui est de nos recherches à venir, nous avons élaboré une feuille de route de la recherche et de l'action sur la polycrise qui est axée sur la collaboration entre les quatre organisations que j'ai identifiées précédemment, et qui énonce nos plans pour faire progresser la recherche au cours des prochaines années. Diapositive suivante. Diapositive suivante.

[00:41:01 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Merci, Je pensais qu'il y en avait une de plus, mais il s'avère que c'était la dernière. Merci beaucoup et j'espère vous voir participer à notre conversation.

[00:41:11 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield : Merci, Tad, excellente présentation. J'ai vraiment, vraiment apprécié votre analyse détaillée. J'ai particulièrement apprécié la visualisation, qui m'a vraiment aidée à voir avec un peu plus de clarté quelque chose que je trouve particulièrement complexe et important. Et le seul inconvénient de tout cela, c'est que j'ai tellement de questions et je veux m'assurer de garder du temps pour les questions de tous les autres.

[00:41:32 Texte superposé à l'écran : Série sur la gouvernance dans un monde complexe : Comprendre ce qu'est la polycrise mondiale. / Série sur la gouvernance dans un monde complexe: Comprendre ce qu'est la polycrise mondiale.] 

Caroline Pitfield: Nous essayons donc de réfléchir à la façon d'utiliser le plus efficacement mon privilège d'animatrice pour vous poser une question qui pourrait vous permettre d'aborder certaines des choses qui m'intéressent.

Alors, voilà la question. Je suis toujours et avant tout une fonctionnaire pragmatique. Et vous connaissez les fonctionnaires, nous parlons constamment de priorisation. J'hésite à vous poser cette question parce que je pense que vous l'avez dit très clairement, il faut aborder la polycrise dans son ensemble. Et pourtant, je ne peux m'empêcher de me demander s'il existe une tension ou un déclencheur, un domaine en particulier que nous devrions prioriser, en tant que fonctionnaires peut-être, ou que vous jugez simplement que nous devrions prioriser en tant que communauté de personnes intéressées. Et si la notion de priorisation est vraiment contraire à votre approche, comment pouvons-nous nous attaquer à la polycrise?

[00:42:24 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Non, c'est une question tout à fait appropriée, puisque nous la posons nous aussi. Tout d'abord, le cerveau humain a seulement une capacité limitée pour gérer autant de choses en même temps. Et vous savez, d'une certaine manière, même si nous affirmons qu'il faut aborder ces choses dans leur ensemble, nous introduisons néanmoins une sorte d'outil réductionniste, le modèle STC, qui nous permet d'entrer dans un système et d'en séparer les différentes parties. Il est donc toujours essentiel de pouvoir voir les différentes parties. Dans n'importe quel système émergent, vous devez pouvoir déterminer la nature de ses différentes parties. Et il n'est pas déraisonnable de demander laquelle de ces parties semble avoir le meilleur impact ou le plus grand impact sur tout ce phénomène.

Techniquement, la question que vous voulez poser est de savoir laquelle de ces parties, ou laquelle de ces composantes, change plus rapidement que toute autre chose et, par conséquent, change le plus fortement les phénomènes plus importants, le phénomène émergent plus important, en l'occurrence la polycrise. Et si je devais – quand je pose cette question, je reviens toujours au réchauffement climatique. Et puis l'intervention politique laisse affirme très directement : nous devons résoudre le problème des émissions de carbone.

Et le problème climatique est essentiellement un problème énergétique. Et notre problème énergétique est essentiellement un problème d'électricité, un problème d'électricité à faible émission de carbone ou à zéro émission de carbone. Alors, comment est-il possible que l'humanité génère aussi rapidement que possible de grandes quantités d'électricité presque zéro carbone et passe d'une civilisation construite autour des combustibles fossiles à une civilisation construite autour de sources d'électricité zéro carbone?

Donc, le problème du climat. La raison pour laquelle je l'ai souligné lorsque je parlais de tensions, j'ai parlé de déclin de la croissance économique, mais j'en ai aussi parlé quand je mentionnais l'amplification, l'accélération du réchauffement climatique, et j'ai montré le graphique de James Hansen avec l'accélération, puis ses données sur les déséquilibres énergétiques de la Terre, parce que je veux vraiment que les gens comprennent. Ce déséquilibre énergétique, cette injection d'une énergie équivalente à un million de bombes atomiques chaque jour dans l'atmosphère et le système océanique de la planète, est en fin de compte une menace existentielle pour la civilisation humaine. Si on ne résout pas ça, rien d'autre n'a d'importance.

Cela dit, il y a beaucoup d'autres choses qui se produisent indépendamment dans le système et qui aggravent les répercussions climatiques, au point où; nous constatons des écarts de richesse qui se creusent constamment. Et ces choses se produiraient indépendamment de ce qui se passe avec le système climatique, bien que je pense que les impacts climatiques commencent à aggraver ces écarts de richesse. Mais ces écarts de richesse font en sorte qu'une grande partie de nos sociétés, et partout dans le monde, les pauvres qui sont plus vulnérables et les sociétés plus pauvres, sont beaucoup plus sensibles aux changements climatiques. Il y a un effet d'interaction entre les deux, donc vous devez finalement prendre du recul et regarder l'ensemble.

Mais à l'Institut Cascade, reconnaissant que le climat est un problème critique, que l'énergie est au cœur de ce problème, nous avons créé un important programme de recherche sur les énergies alternatives, sur l'énergie géothermique ultra profonde, parce que résoudre ce problème énergétique est une condition nécessaire à la survie de la civilisation humaine.

[00:46:06 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Cela vous a-t-il au moins partiellement satisfaite?

Caroline Pitfield: Tout à fait. Il s'agit d'un merveilleux argument supplémentaire expliquant pourquoi nous devons agir au sujet du changement climatique, en ce sens qu'il contribue à tous ces autres facteurs.

Dr Thomas Homer-Dixon : C'est vrai. Donc, en fait, si vous commencez à retracer les relations, et cela fait partie de ce que nous allons faire dans notre analyse globale des tensions, je m'attends à ce que lorsque vous dressez la carte causale des relations entre ces tensions, le climat affecte de plus en plus à peu près tout dans le système, parce qu'il est tellement déstabilisant. Et vous recherchez toujours les conditions nécessaires, les conditions prérequises. Si on ne répare pas le climat, rien d'autre n'aura d'importance. C'est donc un point de départ essentiel.

Caroline Pitfield: Je proposerais une autre question qui m'est venue à l'esprit alors que je vous écoutais, au sujet de cette grappe de choses qui ont à voir avec la bonne gouvernance locale ou mondiale. Donc, la montée de l'autocratie, la méfiance envers le gouvernement, toute cette grappe m'inquiète un peu parce que vous avez dit qu'il fallait résoudre la crise climatique. Eh bien, résoudre signifie se réunir, résoudre signifie leadership, résoudre signifie collaboration. Donc, cette grappe m'inquiète un peu aussi.

Dr Thomas Homer-Dixon : Oui. Et en fait, il y a une boucle de rétroaction pernicieuse ici, une boucle de rétroaction vraiment malicieuse qui sape notre capacité à résoudre le problème climatique. Parce que – cela remonte à mes travaux d'il y a plus de 30 ans, qui commencent maintenant à revenir au premier plan des préoccupations des gens, je pense – ces tensions profondes, comme les tensions climatiques, ont en fait tendance à induire des conflits, à affaiblir les institutions, à affaiblir les gouvernements, à extraire du système des capitaux qui devraient être utilisés, par exemple, pour réparer les infrastructures ou les dommages causés par des événements extrêmes. Et dans la mesure où; ils réduisent la croissance économique, et les changements climatiques ont certainement un impact sur la croissance économique. Ils aggravent les compétitions à somme nulle entre les groupes, entre les différents acteurs et les groupes d'intérêts au sein des sociétés. Tout cela rend plus difficile pour nous, en fin de compte, de développer la coopération autour de la résolution du problème des changements climatiques.

J'avais relevé l'existence de cette boucle de rétroaction au cours des années 1990, dans mes travaux sur l'écart d'ingéniosité. Il y a maintenant un groupe à l'Université d'Exeter, et à Chatham House au Royaume-Uni, qui appelle cela le risque de déraillement, comme dans le déraillement d'un train.

[00:48:29 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Et c'est essentiellement le même argument. Et c'est vraiment encourageant de voir que d'autres commencent à reconnaître le pouvoir de cette boucle de rétroaction pernicieuse, dans laquelle des choses comme les changements climatiques minent en fait notre capacité de régler le problème des changements climatiques. C'est quelque chose qu'on doit s'efforcer de beaucoup mieux comprendre.
Par le passé, la réponse standard de l'économie néoclassique à ces problèmes était, « Eh bien, vous avez une rareté induite par le changement climatique ». Il y a une pénurie de nourriture, ou quelque chose comme ça, les prix s'ajusteront et stimuleront les incitatifs, les initiatives et l'entrepreneuriat, et vous obtiendrez un flux d'idées nouvelles, de solutions et de technologies pour répondre à la rareté sous-jacente.
Notre argument, l'argument du groupe Exeter et celui que je faisais tantôt, est que dans certains cas, cela peut en fait affaiblir votre capacité d'adaptation et de réponse, plutôt que de renforcer votre capacité d'adaptation et de réponse. Et nous devons nous occuper de cette boucle de rétroaction pernicieuse le plus rapidement possible.

[00:49:40 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: Aussi, ici vous dites que nous devons progresser en dépit de notre biais inné envers une optique optimiste. J'aimerais vous donner l'occasion de revenir à la question de la recherche, des lacunes en recherche et des modèles de recherche, parce que vous avez mentionné que vous avez d'autres choses à partager à ce sujet. Mais avant de vous inviter à le faire, je tiens à rappeler aux gens de partager leurs questions,

[00:49:58 Caroline Pitfield apparaît en mode plein écran.] 

Caroline Pitfield: parce que nous aurons environ une demi-heure pour les questions et réponses par la suite, et je veux leur rappeler comment ils doivent procéder. Si vous avez des questions, n'hésitez pas à nous les transmettre dès maintenant. Cliquez sur la bulle dans le coin supérieur droit de l'interface de webdiffusion. Idéalement, nous aurons une couple de bonnes questions pour vous lorsque je cesserai d'exercer mon privilège d'animatrice.

Alors, j'aimerais revenir à cette question sur – quelques questions en fait. Quelles sont les lacunes que nous constatons en matière de recherche? Avec quels types d'outils travaillez-vous pour nous aider à combler ces lacunes en matière de recherche? Que devons-nous faire, à cet égard, pour vraiment régler cette grappe de problèmes, ou ce problème?

[00:50:35 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Oui. Donc, dans un certain sens, cette recherche sur la polycrise est fondamentalement un exercice prospectif qui permet d'élaborer de meilleures estimations probabilistes de ce à quoi pourrait ressembler l'avenir. Et il existe de nombreuses méthodes prospectives, dont certaines sont en fait utilisées au sein du gouvernement canadien. Il existe des groupes de prospective transversaux, comme Horizons de politiques Canada. Bon nombre des ministères ont leurs propres petits groupes internes d'exploration prospective. Je pense que les outils qui sont utilisés dans la plupart des cas – et cela ne vise pas à dénigrer ou à déprécier tout ce que quelqu'un fait. Je crois, par exemple, que les travaux d'Horizons de politiques Canada sont extrêmement importants et qu'il s'agit simplement d'un excellent travail, mais je crois que nous avons besoin de nouveaux outils. Et à l'Institut Cascade, nous essayons de développer ces outils. Et je peux simplement mentionner très rapidement, si nous pouvons afficher de nouveau la diapositive sur les méthodes, ce que nous faisons à l'Institut Cascade.

[00:51:31 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon :  C'est un peu technique, mais je pense que ça va intéresser les participants. Vous avez trouvé la diapositive?

Caroline Pitfield: Oui.

Dr Thomas Homer-Dixon : Oui. OK. Alors, nous adoptons en ce moment, ou nous commençons à appliquer, une méthode appelée analyse de l'équilibre entre impacts croisés. Donc, allons juste deux diapositives plus avant, et vous verrez la couverture d'un article qui a été publié par un érudit allemand, Wolfgang – oh, nous sommes allés trop loin.

[00:52:05 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Ah, voilà. Wolfgang Weimer-Jehle. Cet article a été publié en 2006. Il en a beaucoup publié d'autres depuis. Il est le pionnier de cette approche. Elle permet d'agréger de très grandes quantités de données que vous pourriez qualifier de floues, ou encore des renseignements obtenus auprès d'experts sur la nature du fonctionnement de différents systèmes.

Donc, quand nous sommes confrontés à quelque chose comme une polycrise, nous tentons d'intégrer le système économique mondial, le système alimentaire, le système énergétique, le système de transport, le système géopolitique, divers types de régimes dans le monde, simplement une quantité énorme de choses. Maintenant, n'importe quel expert serait en mesure de comprendre un petit nombre de ces systèmes. Ainsi il pourrait peut-être savoir, après des décennies d'efforts, de recherche et de suivi de la situation mondiale, lorsque quelque chose se produit dans cette partie du système qu'il connaît, il pourrait comprendre que quelque chose d'autre se produit à cet autre endroit. Ils pourraient alors affirmer, avec un grand degré de certitude, que ces deux choses sont reliées. Mais ils ne sauraient pas trop ce qui se passe ailleurs dans tous ces systèmes, peut-être rien du tout.

Donc, ce que cette méthode, l'analyse de l'équilibre entre impacts croisés, nous permet de faire, c'est de réunir toutes les connaissances diverses des experts, toute cette intuition, dans un grand modèle unifié. Passons à la diapositive suivante.

[00:53:23 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Et je ne vais pas aller plus loin que cette matrice et oui, elle ne paie pas de mine. En fait, passons plutôt à la diapositive suivante et restons-y un instant. Il va y avoir une version en français, puis je pense une version en français. Je suis toujours étonné que des gens puissent faire ça, faire les traductions.

[00:53:42 Écran divisé : Dr Thomas Homer-Dixon et diapositive, telle que décrite.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Restons sur cette diapositive un instant. Je ne vais pas entrer dans les détails ici, mais ce que vous pouvez voir du côté gauche, entouré par la ligne bleue, est une série de variables, essentiellement, qui décrivent l'état macro du système mondial : climat, énergie, production alimentaire mondiale. Et puis, à l'intérieur de chacune de ces variables, il y a des états distincts : climat hautement non linéaire en 2030; stable non linéaire. Et ceci est seulement la toute première tentative. Nous sommes sur le point de produire ce que nous appelons le Modèle 2.0 de la polycrise, qui englobera un plus grand nombre de variables d'état.

Chacun des nombres dans ces sous-matrices ici représente une relation possible entre un état particulier d'une variable d'entrée et un état particulier d'une variable de sortie. En haut, vous pouvez avoir exactement les mêmes variables avec exactement les mêmes états. Et je ne vais pas expliquer en détail comment nous produisons ces chiffres, mais ils sont tous fondés sur des jugements d'experts. Ce sont ici, pour ceux d'entre vous qui connaissent les statistiques, des évaluations bayésiennes de la confiance à l'égard d'une relation particulière entre deux variables. C'est le genre de choses où; nous pourrions utiliser des renseignements obtenus auprès d'experts et les intégrer à cette matrice.

Nous pouvons laisser ces diapositives de côté un instant et je vais vous révéler quelque chose. Voici la version française. La petite révélation est que vers le printemps prochain, la version 2.0 du Modèle sera en ligne.

[00:55:22 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Tout le monde pourra voir comment nous en sommes arrivés aux jugements utilisés pour chaque chiffre. Donc, pour chacun de ces chiffres, vous serez en mesure de placer votre curseur au-dessus pour lire la justification connexe. La méthode d'analyse utilisée, les calculs qui appliqués à ces chiffres seront très clairs. Et ce que cette méthode vous permet de faire, c'est de déterminer où; le système est le plus susceptible d'être au repos, quelles sont les interactions entre tous ces systèmes d'une manière qui produit une zone de stabilité ou peut-être plusieurs zones de stabilité.

Bon, certaines de ces zones de stabilité peuvent être annonciatrices de très mauvaises nouvelles. En fait, cette matrice particulière génère près de 14 000 combinaisons possibles d'états. Elle génère une zone très stable, et ce n'est pas une zone particulièrement agréable en 2030. C'est plus ou moins le même monde qu'aujourd'hui, mais en bien pire. Mais la matrice génère aussi une douzaine d'autres états qui ne sont pas tout à fait aussi stables. Mais aussi, il y a des bassins d'attraction moins profonds, et six d'entre eux sont relativement positifs.

[00:56:21 Texte superposé à l'écran : Thomas Homer Dixon; directeur général, Institut Cascade, Université Royal Roads, Colombie-Britannique. / Directeur general, Institut Cascade, Université Royal Roads, Colombie-Britannique.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Et ce qu'il faut mentionner à propos de cette approche, c'est qu'elle vous aide à identifier les voies possibles à travers ce paysage très complexe où; tous ces éléments interagissant, les voies qui peuvent vous mener d'où; nous sommes aujourd'hui jusqu'à l'un de ces bassins plus stables. Quels types de modifications stratégiques, quels types de choses vous auriez à changer au sein du système dans plusieurs ministères au Canada ou à l'échelle mondiale pour arriver réellement à un bon endroit plutôt qu'à un mauvais endroit? Nous croyons qu'il s'agira d'un outil extrêmement puissant. Il y a seulement une cinquantaine de personnes dans le monde en ce moment qui savent comment l'utiliser cet outil efficacement, mais nous voulons le rendre largement utilisable au cours de la prochaine année.

[00:56:57 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: Merci beaucoup pour cette explication. Je vois que nous avons des questions de l'auditoire et que certaines d'entre elles pourraient toucher un peu de ce dont nous parlons maintenant. Par exemple, l'une des questions pour vous ici, Tad, est : Comment la futurologie et la prévision entrent-elles dans le tableau et comment cet outil interagit-il avec d'autres personnes de ces disciplines qui travaillent ensemble?

[00:57:20 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : OK. Eh bien, la plupart des exercices prospectifs en ce moment sont fondés sur des scénarios et consistent à obtenir de l'information auprès d'experts au moyen d'un processus quelconque, un processus Delphi par exemple, puis à construire des histoires et des récits au sujet des événements futurs. Cela peut être très utile, mais il y a un inévitable biais de disponibilité. Vos histoires au sujet des événements futurs tendent à refléter ce que vous comprenez en ce moment présent. Et nous avons certainement des preuves d'un biais de disponibilité extraordinaire dans les rapports d'analyse des risques du Forum économique mondial, dans l'une de nos évaluations dans l'introduction sur l'analyse de la polycrise. Je pense que cette approche particulière, l'approche de l'équilibre entre impacts croisés, nous permet de prendre nos distances un peu de ce lien avec le passé immédiat, pour rechercher plutôt des combinaisons de facteurs que nous ne pourrions pas percevoir autrement ou que les experts ne reconnaissent pas.

Cela nous permet également d'identifier ces boucles de rétroaction à renforcement mutuel, ce que les chercheurs appellent des boucles de rétroaction positive. Ce ne sont pas des boucles de rétroaction agréables. Ce sont en fait des boucles déstabilisantes justement parce qu'elles se renforcent mutuellement. Je dis à mon équipe de rechercher les rétroactions positives. Et beaucoup d'entre elles ne sont pas particulièrement visibles. J'en ai montré une dans ma présentation sur la pandémie et le système de santé. Ce qui sera utile pour les analyses prospectives, c'est d'essayer de voir où; ces boucles de rétroaction positives pourraient se manifester avant qu'elles ne commencent réellement à se manifester. Celle que j'ai identifiée entre une pandémie et le système de santé était tout à fait prévisible, pourtant, dans l'ensemble, on ne l'avait aucunement prévue. Comment l'épuisement professionnel des travailleurs de la santé allait aggraver la pandémie. Et je pense que nous pourrions mieux utiliser certaines de ces nouvelles technologies de modélisation pour compléter, non pas pour remplacer, mais pour compléter les approches prospectives existantes.

Et la dernière chose que je voudrais dire, c'est qu'il y a d'autres approches plus quantitatives. Cette approche de l'équilibre entre impacts croisés, je la qualifie de quasi quantitative. C'est une sorte de base de données floue. Il y a des approches comme la dynamique des systèmes ou les modèles d'équilibre général qui sont utilisés par les économistes, par les personnes qui utilisent des modèles d'évaluation intégrés pour analyser les répercussions des changements climatiques. Je pense que nous devons trouver comment nous pouvons regrouper ces choses et passer le bâton d'une approche à une autre. L'analyse de l'équilibre entre impacts croisés est une sorte de tableau plutôt grossier de l'ensemble. C'est ce que Murray Gell-Mann, le célèbre physicien, appellerait un regard grossier sur l'ensemble. C'est très utile. Mais il faut parfois se plonger dans des parties spécifiques du système, du système économique et des autres systèmes, et faire des modélisations beaucoup plus spécifiques. Et c'est là que quelque chose comme la dynamique des systèmes peut entrer en jeu.

[01:00:24 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: Merci beaucoup pour cette explication. Une chose que vous avez dite en particulier qui m'a vraiment marquée, c'est la nécessité de rompre avec ce que nous savons déjà ou de rompre avec ce biais de disponibilité, selon lequel nous nous racontons des histoires en fonction de ce qui s'est passé auparavant, en fonction de ce que nous avons déjà vu, cette rupture si importante pour voir les choses que nous ne verrions pas autrement.

Et cette question est peut-être reliée à une autre question que nous avons de la part de l'auditoire, qui porte sur l'utilisation de l'intelligence artificielle dans ce domaine. Donc, il est possible que, compte tenu de la complexité, des interrelations entre les tensions, des déclencheurs, des crises, l'analyse par l'IA soit le seul moyen d'aller au-delà de notre propre capacité humaine de gérer mentalement un problème d'une telle portée. La raison pour laquelle je fais le lien avec le problème de disponibilité est que l'IA doit aussi gérer certains de ces problèmes, selon ce que nous savons déjà.

Donc, l'IA et ces travaux, comment ces deux éléments s'intègrent-ils dans vos travaux ou dans votre vision de la polycrise?

[01:01:21 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Je crois donc qu'il y a un énorme potentiel d'utilisation de l'IA dans ce domaine. Et nous allons générer le Modèle 2.0 de la polycrise ce printemps sans utiliser l'IA. Mais j'aimerais inviter des experts en IA à participer au processus pour voir comment nous le faisons et quelles parties de celui-ci peuvent être automatisées.

Donc, ce sont, comme je l'ai dit, ce sont des jugements bayésiens. Chacun de ces chiffres représente un jugement bayésien sur l'influence potentielle d'un état dans un système donné sur un état particulier dans un autre système. Ainsi, un jugement bayésien est essentiellement un niveau de confiance et une hypothèse particulière sur une relation entre deux états. Et il devrait être possible de former un système d'IA à rechercher, dans un sens, à analyser les données existantes, à chercher le meilleur jugement sur la confiance quant à la relation entre deux états. Ou peut-être même pour mieux désagréger les variables du système, un genre d'analyse des tensions globales.

J'aurais été sceptique, mais j'ai assisté à la présentation de Geoffrey Hinton hier soir à Toronto, et j'ai appris sur les progrès extraordinaires en matière d'intelligence artificielle, qui dépassent largement ce à quoi les gens s'attendaient, même les grands experts du domaine, il y a seulement quelques années. Nous commençons à percevoir ce que les experts appellent l'intelligence surhumaine. Une intelligence bien supérieure à tout ce qu'un individu peut produire. Néanmoins, je pense que ça va prendre un certain temps avant que l'on enlève entièrement les êtres humains de l'équation.

Et n'oubliez pas – je pense à quelqu'un comme Tom Friedman, le journaliste du New York Times que je connais un peu, et je pense à ses connaissances sur le Moyen-Orient, qu'il étudie depuis des décennies. Et Tom dirait : « Quand ce genre de chose arrive ici, alors je m'attends à ce que ça arrive là-bas aussi ». C'est essentiellement un réseau neuronal. Pendant des décennies, il a entraîné son propre réseau neuronal en renforçant sa capacité de reconnaissance des motifs pour en arriver à cette intuition. L'intelligence artificielle ne peut pas reproduire ça. En fait, nous devons plutôt amener des gens comme Tom Friedman et d'autres experts à se disputer, littéralement, sur le chiffre à entrer dans une analyse de l'équilibre entre impacts croisés.

Une chose que je veux préciser, c'est ces matrices seront entièrement modifiables. En d'autres termes, elles seront de nature ouverte. Les gens pourront en prendre connaissance. S'ils n'aiment pas les chiffres, ils pourront les changer. Ils pourront lancer le logiciel et exécuter leur propre analyse de sensibilité. Donc, contrairement à quelque chose comme le modèle World 3 qui a fait l'objet de nombreuses approches globales. Par exemple, en revenant jusqu'à Limits to Growth, qui est basé sur le calcul différentiel, celui-ci sera entièrement ouvert, de source ouverte. Et je pense que cela sera vraiment excitant. Les personnes intéressées vont pouvoir mener leurs propres recherches, d'une certaine manière, et en comprendre les résultats. Elles pourront faire leurs propres tests de sensibilité.

[01:04:13 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: On dirait que nous aurons peut-être besoin d'une nouvelle présentation de votre part à la fonction publique dans un an, quand vous lancerez cette nouvelle version.

Dr Thomas Homer-Dixon : Tout à fait.

Caroline Pitfield: Peut-être rester sur le sujet de la technologie en général, nous une autre question ici, à savoir quel impact les nouvelles technologies ont-elles à la fois sur la résolution possible de la polycrise mondiale, mais aussi sur l'aggravation des tensions et des déclencheurs dans la polycrise?

Dr Thomas Homer-Dixon : Eh bien, c'est vraiment un truisme de dire que chaque technologie a deux côtés, à la fois des avantages et des inconvénients.

[01:04:43 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Mais après avoir étudié ces choses pendant des décennies, en fait depuis mon doctorat au MIT, je ne pense pas que les préjudices et les avantages soient réellement toujours égaux. Certaines technologies favorisent nettement certains avantages et d'autres favorisent nettement certains préjudices. Dans certains cas, il pourrait s'agir d'une situation du genre, « D'un côté vous avez X, mais d'autre part vous pourriez bien avoir Z. » Et malheureusement, il peut être difficile de savoir comment juger ces différences et comment élaborer des politiques pour accentuer les avantages et réduire les préjudices, en l'absence d'un gouvernement compétent, d'États compétents. Malheureusement, partout dans le monde, nous constatons un rejet généralisé du rôle du gouvernement dans la résolution des problèmes. Et ce ressac est particulièrement virulent dans certaines régions du monde. Je pense, dans certaines communautés au sud de la frontière, par exemple, que le gouvernement n'est qu'une perte de temps, qu'il est inutile, qu'il aspire les ressources hors du système par ses taxes et impôts, et que ces élites sont incompétentes.

L'un des enjeux, bien sûr, est qu'au fur et à mesure que nos problèmes sont devenus plus difficiles dans le monde, assurément nos élites technocratiques réussissaient de moins en moins à s'y attaquer. Et les observateurs le constatent et remarquent, « Eh bien, vous ne faites pas votre travail, vous êtes censés vous occuper de ça. Et pourquoi alors devrions-nous vous donner toute cette richesse, tout ce pouvoir, tout ce statut dans notre système si vous ne vous occupez pas de ça? » Alors voilà, débarrassons-nous du gouvernement.

Mais quand il s'agit de choses comme l'intelligence artificielle, et ça c'était l'un des faits saillants de la présentation hier soir à la conférence de Geoffrey Hinton, nous avons vraiment besoin de réglementations. Nous avons besoin que les gouvernements participent, des gouvernements très compétents, pour tenter d'accentuer les avantages et de réduire les préjudices. Nous ne résoudrons pas le problème du changement climatique en l'absence de gouvernements compétents. Nous serions alors confrontés à une myriade d'éléments technologiques fragmentés. Mais nous avons besoin d'une solution coordonnée à l'échelle mondiale, avec un taux de participation extrêmement élevé de la part des gouvernements au niveau national, au niveau mondial. Et c'est la même chose avec les maladies virales zoonotiques. Ces exemples, soit dit en passant, les changements climatiques et les maladies virales zoonotiques, ce sont deux exemples seulement des problèmes qui doivent tous être résolus à l'échelle mondiale, sinon aucun ne pourra être résolu.

Et malheureusement, l'évolution actuelle des institutions humaines et des civilisations humaines semble maintenant nous éloigner de ce type de collaboration. Cela revient à ce dont je parlais tantôt, cette boucle de rétroaction pernicieuse. Alors que nous devenons plus en colère et plus effrayés, nous avons tendance à nous éloigner des institutions qui peuvent en fait nous aider à résoudre ces problèmes. Ce n'est pas une histoire heureuse, mais je peux seulement dire, espérons qu'il y aura une reconnaissance plus large du rôle essentiel des gouvernements dans nos sociétés à l'avenir.

[01:07:42 Caroline Pitfield apparaît en mode plein écran.] 

Caroline Pitfield: Oui, la réglementation à l'échelle mondiale a toujours représenté un défi. Et je pense qu'à mesure que nous voyons les institutions multilatérales jouer un rôle différent, cette question devient :

[01:07:53 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Oui, ou bien le multilatéralisme semble naïf, ou bien c'est maintenant un terme péjoratif. On le lance dans une conversation tout juste comme un juron, « Oh, ça c'est juste du multilatéralisme, vous savez! ».

Caroline Pitfield: Tout à fait. C'est très malheureux. Voici une des questions que nous venons de recevoir, je pense que vous l'avez abordée dans votre réponse, est-ce que nous avons perdu l'ambition dont nous avons besoin pour affronter les dimensions de la polycrise? Et je pense qu'un peu de ce que vous avez dit plus tôt suggère que les gouvernements, au moins, devraient peut-être reprendre en main cette responsabilité. Ils doivent mettre en œuvre toute la puissance de leur mandat et en faire plus dans certains de ces espaces, non pas en s'attaquant directement à la polycrise elle-même, mais en visant ces différentes composantes, qu'il s'agisse de réglementation ou de l'intelligence artificielle. Nous avons peut-être, en effet, perdu un peu notre ambition.

Dr Thomas Homer-Dixon : Oui. Donc, deux parties à cette réponse. Je vais commencer avec une réponse plus générale, puis j'expliquerai plus en détail ce que les gouvernements devraient faire.

[01:08:53 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : La réponse plus générale, c'est qu'il s'agit de – et ce n'est pas une réponse très satisfaisante – mais nous devons simplement reconnaître qu'il s'agit d'une transition qui est vécue en ce moment par notre espèce à l'échelle mondiale. La population mondiale de 8,5 milliards d'humains atteindra probablement un sommet de 9,5 à 10 milliards, puis elle commencera à diminuer très rapidement. Ça c'est ce que le célèbre entomologiste de Harvard, E.O. Wilson, avait qualifié de goulot d'étranglement. Nous traversons une période exceptionnellement difficile au cours du présent siècle, marquée par des transitions matérielles et technologiques ainsi que des transitions démographiques, et cela génère énormément de turbulences. Et franchement, je suis un théoricien des conflits. C'est dans ce domaine que j'avais entrepris ma carrière, et c'est dans cette optique que je travaille dans ce domaine. Il va y avoir beaucoup de violence dans le monde à cause de ces perturbations.

Mais encore une fois, la réponse plus large ici, le côté plus optimiste qui peut exister, c'est que – et c'est ce que je dis à mes enfants qui ont 19 et 16 ans maintenant – cette situation créera des possibilités de changements plus radicaux et de réformes plus radicales dans nos systèmes. C'est un principe auquel j'avais donné un nom dans un de mes ouvrages précédents, la catagenèse, un processus de rupture suivi d'une renaissance et d'une reconstruction. Cette notion remonte aux travaux de gens comme Buzz Holling, le célèbre écologiste canadien, et de la Resilience Alliance. Et dans la foulée de l'École autrichienne d'économie, la notion de destruction créatrice proposée par Schumpeter. Parfois, vous avez besoin d'une crise pour briser la sclérose et créer des opportunités de changement fondamental. Et c'est une telle situation que les idées avec lesquelles les gens expérimentent dans diverses communautés, ou dans divers gouvernements et cercles politiques, peuvent mener à des possibilités. Ces idées pourraient alors avoir la possibilité d'être développées, une possibilité qu'elles n'ont tout simplement pas à l'heure actuelle.

Donc, ce que nous voyons dans le monde en ce moment ne fonctionne pas très bien. Donc, quand mes enfants sont particulièrement désespérés, je leur dit, « Eh bien, il faut que ça se casse avant que vous puissiez le réparer. » Nous traversons une période de cassure en ce moment, et nous allons vivre des choses effrayantes et terrifiantes, mais pourtant, c'est ainsi que tous les systèmes complexes s'adaptent en fin de compte. Ils ont des moments de crise, puis ils se reconfigurent pour s'adapter au nouvel environnement.

Donc ça, c'est la réponse plus générale. La réponse plus précise est, selon moi, que la communauté des décideurs et les gouvernements doivent faire trois choses. Nous devons nous concentrer sur trois domaines. La prévoyance, la résilience et la flexibilité. Parce que je réfléchissais à cette question et à ce que les gens doivent entendre et voudraient entendre. Il y a un rôle pour le gouvernement. Nous devons collectivement faire mieux. Et je vois la prévoyance, ce n'est pas seulement au gouvernement, mais c'est une entreprise pour l'ensemble de la société. Nous devons collectivement faire mieux en matière de prévoyance. En ce moment, Horizons de politiques Canada fait un excellent travail, mais je veux dire, ses bureaux viennent d'être déplacés à l'extérieur de la ville, entre autres choses. Ils sont près de la gare maintenant. À l'origine, dans son incarnation antérieure, l'organisme faisait partie du Bureau du Conseil privé. Je pense que ces capacités et ces compétences doivent être au centre du gouvernement. Ils doivent être à proximité des décideurs les plus expérimentés du gouvernement. Et ils doivent avoir la capacité et les ressources nécessaires, et ne pas seulement être sur demande et sur commande en réponse à des questions particulières qu'un ministre pourrait avoir, mais ils doivent pouvoir explorer des choses auxquelles les gens ne pensent peut-être pas encore, mais qui pourraient s'avérer incroyablement importantes. Et je sais que Horizons de politiques Canada fait une partie de ces choses très bien, mais je crois que nous devons renforcer cette capacité.

Donc, vient ensuite la question de la résilience. Parce que la résilience, c'est être capable de mieux réagir aux imprévus ou aux éventualités qui choquent le système, et d'utiliser ces chocs comme moyens de créer ce changement positif dont je parlais auparavant. La résilience est un terme utilisé partout en ce moment. C'est intégré à un très grand nombre de politiques. Je ne pense tout simplement pas que nous utilisons la résilience correctement, en partie parce qu'elle n'est pas vraiment bien éclairée actuellement par la prévoyance. Vous devez être en mesure de pouvoir vous faire une idée des possibilités afin de pouvoir être résilient à ces chocs possibles. Donc, la prévoyance et la résilience sont étroitement liées.

Et puis la troisième chose, et c'est la chose la plus difficile, je pense, pour notre communauté de décideurs et pour le gouvernement, c'est cette notion de flexibilité. Parce que peu importe à quel point votre prévoyance est adéquate et peu importe à quel degré votre résilience est intégrée à vos institutions grâce à votre capacité de résister aux chocs et à d'autres éléments semblables, des surprises survenir. Il va y avoir des choses inconnues dont vous ne soupçonnez même pas l'existence, ce que l'armée américaine appelle maintenant des « Unk-Unks », des unknowned unknowns. Dans bien des circonstances, vous ne savez même pas quelles questions poser. Les choses vont juste survenir sans aucun avertissement. Et le gouvernement doit avoir la capacité de simplement pouvoir pivoter, de réaffecter rapidement des ressources, d'expérimenter.

Et aussi – et ça, c'est vraiment difficile. Je l'avais mentionné lors de la conférence Manion en 2011 au Centre national des Arts, et vous pouviez voir les gens qui croisaient les bras à cette idée – il faut être disposés à échouer et à apprendre de nos échecs, parce que c'est avec les échecs que nous apprenons le plus. Nos vies personnelles nous ont tous appris que ce sont nos échecs qui nous en apprennent le plus. Le gouvernement est terrible à cet égard. Donc, cette flexibilité nécessite de l'expérimentation. Cela signifie la volonté d'apprendre de ses échecs. Cela signifie une agilité et une réactivité au changement, ce qui est pour ainsi dire en totale opposition à cette tendance du gouvernement à imposer partout des procédures rigides. Il s'agit donc d'un défi profondément culturel auquel le gouvernement est confronté, mais un défi que nous devons tous relever.

[01:15:14 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: Oui, je suis un grand fan de l'échec positif, cette idée qu'il faut apprendre à échouer. Il y a tellement d'autres questions, mais j'en ai une qui concerne la catagénèse, parce que je pense que c'est un concept intéressant, qui concerne la prévoyance, la résilience, la flexibilité, toutes ces choses.

Certains pourraient dire que nous avons eu quelques crises assez importantes au cours des derniers temps qui pourraient entraîner des changements assez importants dans notre façon de faire les choses. Eh bien, la pandémie en particulier a eu beaucoup d'impacts sur notre façon de faire les choses. Mais on a tendance à ne pas vouloir accepter la nouvelle normalité. On a plutôt tendance à vouloir revenir à ce avec quoi on est déjà familiers. Il y a une tendance à vouloir revenir à ce qu'on connaît déjà. Comment pouvez-vous lutter contre ça? Comment faire pour reconnaître la partie positive de la catagénèse et ne pas être mal à l'aise ou ne pas vouloir revenir à ce que les choses étaient avant?

[01:16:15 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran. Texte superposé à l'écran : Thomas Homer Dixon; directeur général, Institut Cascade, Université Royal Roads, Colombie-Britannique. / Directeur general, Institut Cascade, Université Royal Roads, Colombie-Britannique.]

Dr Thomas Homer-Dixon : Parfois, si le processus de cassure est suffisamment grave, il n'y aura plus rien auquel vous pourrez revenir. Donc, disons-le franchement, c'est ce qui s'est passé avec l'Institution de Bretton Woods après la Seconde Guerre mondiale et les Nations Unies. Je veux dire, Bretton Woods a jeté les bases de 60, 70 ans de la période de prospérité la plus extraordinaire que l'humanité ait jamais connue. Et les Nations Unies, malgré tout de que l'on peut en dire, ont fait beaucoup de bien dans le monde. Les économies les plus vigoureuses du monde juste après la Seconde Guerre mondiale étaient l'Allemagne et le Japon. Et ça, c'est en grande partie parce que leurs infrastructures avaient été détruites et que les structures sociales internes sclérosées et, à certains égards, vraiment pernicieuses avaient été détruites.

Parfois, on ne peut pas revenir en arrière, mais je pense aussi que même dans les situations où; on revient en quelque sorte au statu quo ante, les êtres humains finissent par apprendre, même si parfois ils essaient absolument tout ce qu'ils peuvent avant de finalement admettre, « Bon, ok, je suppose qu'on doit changer. » Je crois que la sagesse que l'on a retenue à la suite de la pandémie en ce moment, c'est qu'elle a été en fait une occasion manquée. Et pourtant, je veux mentionner quelques éléments qui font de cette pandémie, dans le portrait plus général de l'évolution humaine, un phénomène si extraordinaire.

Ainsi, entre début mars 2020 et fin mars 2020 environ, la moitié de la population humaine s'est placée en confinement. Au cours de cette période, le concept de distanciation sociale et physique s'est mondialisé et a changé les comportements des gens partout sur la planète. Il n'y avait jamais eu auparavant, dans l'histoire de l'espèce humaine, un changement aussi important dans un si grand pourcentage des comportements de la population humaine en si peu de temps. Et ce changement a été possible en raison de ce niveau extraordinaire de connectivité. Il a permis de sauver, incontestablement, des dizaines de millions de vies. Juste ces changements dans les comportements sociaux. Les décès auraient dépassé bien plus de 100 millions de personnes si ces changements n'avaient pas eu lieu. Et on en est probablement à 30 millions environ.

Et c'est couplé à une autre chose, une autre histoire positive. Dans les deux jours suivant le téléversement par les Chinois de la structure moléculaire de l'ARN du virus du SRAS CoV2, Pfizer et Moderna avaient tous deux analysé ces données et avaient établi la morphologie de la molécule appropriée pour leurs vaccins. En deux jours. Bien sûr il a fallu du temps par la suite avant que les vaccins soient développés et testés. Ça a pris un certain temps, mais je pense qu'on a atteint le seuil de 40 % de vaccination de la population humaine dans les 24 mois. Maintenant, le processus de vaccination a été injuste. Les riches ont reçu le vaccin avant les pauvres. Beaucoup de gens ne sont toujours pas suffisamment protégés. Mais néanmoins, avant cette pandémie, le record pour vacciner 40 % de la population humaine était de 80 ans. Nous y sommes arrivés cette fois en deux ans seulement.

Ce sont donc des changements assez remarquables, et ils sont survenus pour ainsi dire malgré toutes les dissensions, les grognements et autres contestations. Il y a donc quelque chose de nouveau dans ce monde, et une capacité d'innover, de réagir et d'apprendre que nous n'avions jamais vue auparavant. Alors, il y a bien des raisons d'optimisme, des raisons d'espoir.

[01:19:36 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: Nous sommes presque arrivés à la fin du temps disponible, et je n'ai malheureusement pas été en mesure de lire toutes les questions. Une question très rapide pour vous, une demande de clarification de la part d'une personne qui cherche à obtenir des précisions sur les définitions. Très rapidement, pour que vous ayez le temps ensuite de prononcer le mot de la fin. Les expressions polycrise, métacrise et multicrise sont-elles interchangeables? Pouvez-vous répondre rapidement? Peut-être pourriez-vous.

Dr Thomas Homer-Dixon : Non, non. En fait, vous verrez si vous allez sur le site Web de l'Institut Cascade, nous avons un blog appelé Chalkboard et vous y trouverez une conversation à ce sujet. Plusieurs chercheurs ont introduit d'autres concepts. Par exemple, le concept de méta-crise a été introduit parce que le chercheur qui l'a proposé, dont le nom m'échappe en ce moment, affirmait que le vrai problème ici est une sorte d'idéation profonde d'un système culturel ou de croyance ou de vision du monde désaligné entre l'humanité et la nature du monde. Bon. Les gens proposent des diagnostics différents, et ils utilisent une terminologie différente. Quand on les regarde de plus près, les termes ne sont pas synonymes. Si vous allez sur le site polycrisis.org, je suis à peu près certain que vous verrez cette question abordée directement dans le parcours d'apprentissage comparant les différentes façons d'étiqueter ces phénomènes. En fin de compte, le concept de polycrise continuera à être utilisé s'il est utile pour les gens, et nous essayons justement à l'Institut Cascade de nous assurer qu'il est vraiment utile.

[01:21:02 Caroline Pitfield apparaît en mode plein écran.] 

Caroline Pitfield: Alors, comme j'avais mentionné, j'allais vous donner l'occasion de prononcer le mot de la fin pour les fonctionnaires. Nous n'avons pas couvert tous les points intéressants. Nous n'avons pas vu comment éliminer les cloisonnements. Nous n'avons pas couvert le rôle des inégalités sociales. Mais si vous pouviez donner rapidement quelques mots de sagesse aux fonctionnaires qui cherchent à faire une différence dans ce domaine, quels seraient-ils?

[01:21:22 Dr Thomas Homer-Dixon apparaît en plein écran.] 

Dr Thomas Homer-Dixon : Eh bien, ces deux questions sont très importantes et je devrai peut-être faire une autre présentation pour répondre plus en détail, parce que je pense que c'est quelque chose que je pourrais faire. Mais j'exhorte les personnes intéressées à étudier le sujet et à commencer à se familiariser avec certaines de ces idées liées aux systèmes complexes. Ces idées vous fourniront des outils très puissants pour comprendre ce qui se passe dans votre travail quotidien.

Et, lorsque ces idées seront mieux connues dans la fonction publique, je pense que nous constaterons que celle-ci fonctionne mieux, qu'il y a une meilleure compréhension de la nécessité, et plus d'incitatifs à communiquer au-delà de ces cloisonnements et à rassembler les gens, différents types de connaissances pour faire face aux enjeux qui se multiplient dans les organisations cloisonnées. Si les problèmes évoluent au-delà des cloisonnements, alors nous devons collaborer et travailler en dépit des cloisonnements, et éliminer certaines de ces frontières institutionnelles au sein du milieu universitaire et du gouvernement. Et les outils qui nous aident à y parvenir, pour commencer, sont des outils d'étude des systèmes complexes. J'exhorte donc les gens, s'ils en ont la possibilité, à consulter, par exemple, le site Web de l'Institut Cascade et à commencer à se familiariser avec certaines de ces façons de voir le monde qui sont particulièrement puissantes.

[01:22:36 Écran divisé : Caroline Pitfield et le Dr Thomas Homer-Dixon apparaissent dans les panneaux de clavardage vidéo.] 

Caroline Pitfield: C'est fantastique. Eh bien, nous avons 1 000 personnes à l'écoute aujourd'hui qui souhaitent mieux comprendre ces concepts, alors je pense que vos conseils seront bien écoutés. J'avais pensé moi aussi, quand vous parliez d'Horizons, que nous devrions généraliser ce genre de connaissances. Que tout le monde devrait les garder à l'esprit, et pas seulement de petites grappes de personnes.

Mais cela conclut le temps dont nous disposons. Je tiens à vous remercier beaucoup, Tad, pour cette présentation. Ça a été une conversation vraiment merveilleuse. Nous sommes très reconnaissants de toutes les idées que vous avez partagées et de toutes vos réponses aux questions que nous avons reçues de l'auditoire. Merci également à l'auditoire d'être avec nous aujourd'hui.

[01:23:12 Caroline Pitfield apparaît en mode plein écran. Texte à l'écran : Caroline Pitfield, membre-cadre du corps professoral de l'École de la fonction publique du Canada. / Caroline Pitfield, Membre-cadre du corps professoral, École de la fonction publique du Canada.]

Caroline Pitfield: J'aimerais inviter toute personne qui le souhaite à nous faire part de ses commentaires. Vous allez recevoir un formulaire d'évaluation. Nous utilisons ces commentaires pour nous assurer que notre programmation est aussi pertinente que possible. C'est très, très important pour nous, alors prenez un moment pour le remplir pour nous.

J'aimerais également mentionner que nous avons un événement à venir, qui s'appuie un peu sur celui-ci, le 2 décembre. Il est intitulé Démocratie. Il fait partie de notre série L'exercice de la démocratie, et il portera sur l'incivilité dans la sphère publique.

Donc, je ne sais pas si vous aurez l'occasion d'écouter cette autre présentation, Tad, mais nous penserons à vous et à tout ce que nous avons appris aujourd'hui. Je tiens donc à vous remercier une fois de plus pour une discussion absolument fascinante au nom de l'École, en mon nom et au nom de tous les participants. Merci

Dr Thomas Homer-Dixon : Merci,

[01:23:56 Le logo animé de l'EFPC apparaît à l'écran.]

[01:24:00 Le mot-symbole du gouvernement du Canada apparaît et devient noir.]

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