Transcription
L'envers du décor : l'élaboration des politiques de l'intérieur
[00:00:00 Le logo de l'EFPC s'affiche à l'écran.]
[00:00:04 L'écran passe à Richard D. Sharpe sur un podium.]
Richard D. Sharpe : L'appel à l'action est fondateur, et c'était un cadeau pour nous, et cela devrait être un cadeau, considéré comme un cadeau, pour tous les fonctionnaires. Ce que je voulais faire, c'était parler de trois choses, avec des histoires, avec un peu de panache et de style, ma propre touche personnelle. Je veux parler du parcours du Caucus des employés fédéraux noirs. Je voulais parler un peu de mon parcours au ministère de la Justice du Canada, et je veux parler de mon nouveau parcours au sein de la fonction publique de l'Ontario, tout cela en quelques minutes afin que nous puissions avoir une bonne conversation.
Je pense que pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas le Caucus des employés fédéraux noirs, il s'agissait en réalité de quelques personnes qui se sont réunies dix ans après l'échec d'un autre groupe, un groupe d'employé·es, le Conseil national des minorités visibles. J'étais là pour cela, au début de la campagne du conseil visant à aborder les questions d'équité en milieu de travail pour les personnes racisées que nous appelons minorités visibles, et dix ans plus tard, des gens sont venus me voir pour me dire : Richard, pourquoi ne pas former un groupe pour les personnes noires? Les problèmes des personnes noires n'étaient nulle part visibles dans les discours sur l'inclusion de la diversité dans le cadre de l'équité en matière d'emploi. Même si l'équité en matière d'emploi était l'un des systèmes et instruments de politiques, si vous voulez l'appeler ainsi, mis en place pour soutenir la promotion des personnes noires et d'autres groupes sous-représentés, nous avons constaté que les personnes noires souffraient aux niveaux les plus bas de la fonction publique fédérale et ne bénéficiaient pas du soutien et de l'équité qu'elles méritaient.
Ainsi, quelques-un·es d'entre nous, et je citerai quelques noms ici, se sont réuni·es après une conférence à Toronto où se tenait le Sommet pancanadien des communautés noires, le premier qui s'est tenu à Toronto en 2017. Et quand nous sommes revenus, mon bon ami Robin Browne a suggéré de créer quelque chose ici, et la création de quelque chose ici pour nous deux est en fait devenue trois organisations, l'une d'elles étant le CEFN, qui était liée au contexte de la fonction publique fédérale et au travail que nous faisons. Ainsi, après avoir travaillé au gouvernement fédéral pendant plus de 20 ans, dans les domaines des syndicats, de l'équité en matière d'emploi et de la diversité, et avoir fait beaucoup de manœuvres et de discours sur ces sujets, j'ai réalisé que nous devions diriger différemment dans ce domaine, que nous nous ne pouvions pas nous adresser à la haute direction ou à qui que ce soit d'autre avec les mêmes outils et les mêmes approches que nous avons toujours utilisés. Nous savions pertinemment que si nous ne nous démarquions pas de manière complètement différente, complètement repensée, nous suivrions le même chemin que des organisations précédentes comme le Conseil national de la fonction publique fédérale, le Conseil national des minorités visibles dans la fonction publique fédérale, le CNMV, qui ont connu l'échec en 2019.
Nous avons donc créé ce groupe, en comprenant les conséquences stratégiques de la création d'un groupe au sein de la fonction publique fédérale qui ne faisait pas partie de la fonction publique, mais qui faisait néanmoins pleinement partie de la fonction publique. Je veux dire par là qu'il s'agissait d'un groupe d'employé·es qui s'étaient réuni·es sans aucun soutien ministériel ou institutionnel. Nous avons utilisé notre propre argent pour acheter... fabriquer des cartes de visite. J'étais graphiste dans ma vie antérieure. J'ai conçu des affiches. Nous faisions des rapports. Nous mobilisions les gens. Il y avait cinq personnes, puis 20 personnes, puis 50 personnes. Je me souviens que Services publics et Approvisionnement Canada avait organisé une réunion regroupant des employé·es noir·es d'autres ministères et nous avons un peu envahi une salle de conférence qui était censée accueillir environ 25 personnes, mais il y avait plus de 60 personnes présentes, et donc les gens étaient disposés tout autour de la salle. Et quand les gens ont quitté cette salle de conférence, il y avait des gens, nos collègues blancs et blanches... parce que ça se passait à Gatineau. Nos collègues blancs et blanches, nos collègues francophones étaient tous et toutes debout dans leurs postes de travail modulaires et regardaient ce défilé de personnes noires quitter cette salle de conférence, et il y avait un tel sentiment de manque de pouvoir des gens, le sentiment de ne pas pouvoir contribuer de la manière voulue lors de ces petites conversations près de la fontaine à eau.
Maintenant, nous construisions quelque chose qui avait du sens. Nous l'avons fait à partir de la base, parce qu'en tant qu'organisateur communautaire avant mon arrivée au gouvernement en 1996, je savais que c'était ainsi qu'on faisait les choses, qu'il fallait travailler à partir de la base. Nous avons donc pu commencer ce travail, non seulement pour rassembler les personnes noires, mais nous savions que nous avions besoin de certains moteurs de politique, de certains fondements pour que cela fonctionne, pour obtenir une certaine adhésion de la haute direction, et nous savions qu'il n'y en avait pas. Les personnes noires n'existent pas dans la fonction publique fédérale. Nous sommes regroupés dans ce qu'on appelle les minorités visibles. Les Nations Unies affirment que les minorités visibles sont un terme raciste que le Canada utilise pour désigner la majorité de la population de la planète. Nous savions donc que nous ne pouvions pas utiliser la législation existante dans la mesure où elle existait et de la façon dont les gens l'utilisaient en matière d'équité en matière d'emploi, de multiculturalisme, etc. La Charte des droits et libertés, j'y reviendrai dans un instant, était quelque chose que nous pouvions utiliser.
Ainsi, ô surprise, à peu près au même moment, et nous avons bien synchronisé cela, car je pense que beaucoup de ces choses dépendent du bon moment, le 29 janvier 2018, je crois, le Cabinet du premier ministre a convoqué plusieurs d'entre nous, parmi les leaders noir·es, sur la Colline du Parlement pour une annonce. Je n'avais aucune idée de l'objet de l'annonce, et l'annonce était que le Canada appuyait quelque chose appelé la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine des Nations Unies, ce que j'appelle la DPAF de l'ONU. Et j'ai dit : « Ouah, voilà. C'est notre moteur de politique. Nous pouvons utiliser cela. Le premier ministre en parle, la fonction publique fédérale devrait aussi en parler ». Et c'est à partir de là que nous avons commencé, d'abord en douceur. Nous avons d'abord demandé aux gens s'ils savaient ce qu'était la DPAF de l'ONU. Bien sûr, tout le monde a dit non, mais le premier ministre vient de l'annoncer. J'ai dit : « Oh, voici le communiqué de presse, ce sont les priorités énoncées. Et d'ailleurs, les priorités du CEFN correspondent à ce que dit le gouvernement au sujet de la Décennie. » « Oh, c'est intéressant. »
Nous avons donc commencé à construire cela comme un récit autour de l'utilisation de la DPAF de l'ONU pour mobiliser les fonctionnaires, pour mobiliser la direction au sein de la fonction publique, pour mobiliser la communauté, parce que la communauté ne savait pas non plus de quoi il s'agissait. Nous avons pu redéfinir le récit de ce qu'est une personne noire dans la fonction publique en utilisant cela comme instrument initial. Nous avons eu de belles possibilités avec des partenaires et des collaborateurs et collaboratrices. Je dois saluer de nouveau le sous-ministre Bill Mathews, qui était, à l'époque, sous-ministre de SPAC. Lorsque j'ai trouvé un moyen de le rencontrer, car il ne me connaissait pas du tout, je lui ai dit : « Nous aimerions faire cela et nous aimerions le relier à la DPAF de l'ONU ». Il a dit : « De quoi s'agit-il? ». Et j'ai répondu : « Vous savez quoi? L'une de nos priorités est de rechercher des données ventilées sur l'équité en matière d'emploi afin de comprendre réellement ce qui se passe pour les personnes noires dans le système, car, en passant, je connais beaucoup de personnes noires. Elles me disent que c'est difficile, mais il n'y a aucune donnée à ce sujet. » Et il a répondu : « Eh bien, cela n'a pas beaucoup de sens ». C'est un financier. « Il vous faut des chiffres. Il vous faut des données. Je peux vous aider. » Il a dit : « De combien d'argent avez-vous besoin? ». J'ai répondu : « Je ne veux pas de votre argent. Je ne veux pas d'argent. Je ne veux d'argent de personne d'entre vous. Donnez-moi quelques employé·es et nous le ferons nous-mêmes. » C'est ce qu'il a fait.
Il nous a donné quatre personnes, dont moi-même, pour aller faire des ravages, causer quelques problèmes, faire pression sur certaines personnes, très gentiment bien sûr, et demander aux gens de nous fournir continuellement des données. Nous voulons parler de la santé mentale des personnes noires. Que se passe-t-il avec vos employé·es noir·es? Permettez-nous de vous dire, Monsieur le sous-ministre, nous avons fait une tournée et nous avons discuté avec un certain nombre d'institutions, d'administrateurs généraux et d'administratrices générales, nous avons dû en visiter une quarantaine ici dans la région de la capitale nationale et ailleurs. Nous ne recherchions pas un soutien institutionnel. Ce qui était précieux pour nous, c'était un soutien tacite. Nous voulions simplement qu'une personne entre dans une pièce et nous donne de l'espace pour que nous puissions faire notre travail. Si vous nous mettez dans une pièce pour que nous puissions faire notre travail, je pense que nous pouvons vous convaincre de faire ce qui s'impose. Encore une fois, tous nos remerciements à M. Michael Wernick, qui était greffier avant Ian Shugart. Après avoir fait nos tournées et invité un certain nombre de personnes à discuter avec nous, des parlementaires, je pense que nous nous sommes réunis dans le sous-sol de la Bibliothèque publique d'Ottawa et dans ce théâtre. Ainsi, un certain nombre de personnes voient maintenant que cette initiative prend de l'ampleur au point où elle est remarquée, et demandent des faveurs pour nous permettre de rencontrer le greffier, et c'est ce que nous avons fait.
Et je me souviens de cette conversation avec M. Wernick, qui ne savait pas non plus quel était le problème, ne savait pas qu'il y avait des problèmes. Ce n'est pas qu'il ne savait pas qu'il y avait des personnes noires, mais que les personnes noires rencontraient des problèmes, n'est-ce pas? Et donc, je me souviens lui avoir dit, et nous nous souvenons lui avoir dit : « D'ailleurs », après avoir expliqué pourquoi c'était important, « il n'y a jamais eu de sous-ministre noir·e dans la fonction publique fédérale au cours des 150 ans d'histoire. Vous en êtes conscient, n'est-ce pas? ». Et il s'est tourné vers son homologue, le secrétaire adjoint : « Est-ce vrai? ». Et son homologue a répondu : « Je pense que oui. Je n'en ai jamais vu. » Et ils ont eu cette petite discussion : « Je ne pense pas en avoir jamais vu. » J'ai dit : « Eh bien, bien sûr, vous n'avez jamais vu de personne noire dans ces espaces. C'est votre espace. Ce n'est pas notre espace. » Alors, il a dit : « C'est vraiment intéressant. » Il a dit : « De quoi avez-vous besoin? De quelles ressources? ». J'ai répondu : « Je n'ai pas besoin d'argent de votre part. Nous ne voulons aucune ressource. Dites-leur simplement que nous arrivons. Dites-leur que nous allons leur présenter une demande, et que cette demande concerne l'ouverture de conversations sur l'équité pour les personnes noires. » L'équité pour les personnes noires, je ne savais pas qu'il existait un terme appelé équité pour les personnes noires. Je suis maintenant directeur d'une Direction de l'équité pour les personnes noires de la fonction publique de l'Ontario. Je ne savais pas que l'équité pour les personnes noires était une notion en soi. Je parlais toujours d'équité.
Mais nous nous rendions compte qu'à l'époque, sans le savoir, et c'était en 2018, nous changions en fait le récit, nous changions la politique sur la façon de traiter les personnes noires. En 2020, la COVID avait commencé et ce moment existentiel auquel chacun était confronté à propos de sa propre mortalité a fait réfléchir tout le monde sur la planète, et cette pause nous a permis de réfléchir sur nous-mêmes. Voici ce qui, je pense, se produit. C'est pourquoi je pense... Je parle du moment de l'effet Floyd, ce moment où nous avons tous et toutes réalisé, ce moment où nous avons vu en 8 minutes et 46 secondes qu'un agent suprémaciste blanc de l'État peut mettre fin à la vie d'une personne noire. Toutes les personnes noires ont vécu cela, et à une époque où les gens faisaient l'expérience de leur propre mortalité, c'était un moment de l'histoire que je ne pense pas que nous reverrons de sitôt. Les atrocités commises par les forces de l'ordre contre les personnes noires se sont produites quotidiennement pendant des milliers d'années en Amérique du Nord, mais ce moment précis, ce moment unique, a été d'une telle importance qu'il a galvanisé la planète entière pour soutenir la vie des personnes noires comme je ne l'ai jamais vu auparavant.
Et donc, nous étions là au bon moment, parce que nous nous étions préparés pendant deux ans pour aider la fonction publique à traiter cette réalité appelée les personnes noires. Lorsque l'affaire Floyd a éclaté et que les appels ont commencé à affluer de la part des employé·es de base, des syndicats, de la communauté et des sous-ministres vers notre petit bureau de quatre ou cinq personnes, nous avons réalisé que la fonction publique n'avait pas de langage pour parler de l'expérience des personnes noires. La diversité et l'inclusion... comme je le mentionne parfois dans certaines interventions, en parlant d'être une personne noire dans la Matrice, la diversité et l'inclusion sont une illusion lorsqu'il s'agit de la véritable nécessité de garantir que les êtres humains, les personnes noires, puissent exprimer leur humanité au sein de ces lieux de travail, au sein de la société. C'est quelque chose avec lequel nous devons tous et toutes composer lorsque l'on naît avec cette pigmentation mélanique, n'est-ce pas? Nous ne sommes pas aussi humains que les autres, mais pendant un moment, nous l'étions. Pendant un moment, nous avons joui de notre statut de personne et du droit à la vie. Ainsi, lorsque la fonction publique s'est rendu compte qu'elle n'avait pas ce langage, je l'appelle le langage de l'amour pour les personnes noires, alors nous avons été sollicité·es, non seulement en tant que CEFN mais aussi en tant que cadres noir·es, pour diriger des secrétariats et d'autres organismes institutionnels afin de traiter de l'équité, de la lutte contre le racisme, etc.
Revenons à Ian juste une minute, parce que c'était vers cette époque que nous avions des réunions bilatérales semestrielles avec lui, nous nous avons intégré beaucoup de choses dans ces réunions. Et à l'époque, je ne savais pas qu'il était malade, mais il était très intéressé par ce que nous avions à dire, et encore une fois, presque perplexe face à notre existence, je pense, mais ouvert à notre engagement à soutenir l'organisation. Je lui ai dit : « Vous savez quoi? Si vous ne gérez pas correctement cela, vous allez un jour vous retrouver confrontés à des poursuites judiciaires et ce sera un tas de personnes noires en colère qui viendront réclamer leur argent. » Et il a répondu : « Eh bien, vous savez, en tant qu'homme chrétien », je ne l'oublie pas, « En tant qu'homme chrétien, vous savez, je pense que, vous savez, j'y crois ». J'ai dit : « Je ne crois pas à ces histoires de christianisme. Les Chrétiens m'ont réduit en esclavage. Nous avons une mauvaise histoire avec votre religion. Venez avec moi faire quelque chose de différent. Que voulez-vous vraiment dire par là? ». Et il a dit : « Vous savez quoi? Vous êtes... » D'accord, une pause. « Nous devons faire ce qui est bon pour vous en tant qu'être humain, pour vous les gens, pour vous en tant que communauté, en tant qu'êtres humains. »
Je n'oublierai jamais cela, parce qu'il n'a pas réagi de manière défensive comme tant d'autres personnes lorsque j'ai remis en question l'essence de ce qu'il était. Il était un homme très religieux. Il était un homme de foi, et il y a beaucoup de personnes dans ma famille qui étaient des hommes de foi. Donc, je sais que lorsque je remets en question la foi de quelqu'un, je sais à quel point cela peut être grave, mais il n'est pas revenu là-dessus. Et quand je lui ai dit que mes enfants n'ont aucune intention de travailler un jour pour la fonction publique, maintenant presque adultes et sur le point de quitter la maison, il était de nouveau perplexe. Je suis rentré chez moi et j'ai reçu un courriel, qui venait de Ian. Il disait : « Qu'est-ce qu'il faudrait pour que vos enfants aient envie de faire partie de la fonction publique? ». Et je me dis : « Quoi? Le greffier du Conseil privé n'est pas tellement occupé pour m'envoyer un courriel comme celui-là. »
(Rires)
Que fait-il donc de son temps? Je suis un peu surpris par cela pendant un instant parce que cela montrait que, d'une certaine manière, à un certain niveau, ce haut dirigeant qui dirigeait la fonction publique se préoccupait... non pas de moi, mais de l'avenir de la fonction publique, car je ne cessais de lui dire que nous sommes l'avenir de cette fonction publique, pas nécessairement les personnes noires, mais les personnes de couleur, les personnes noires, sont l'avenir de ce pays. Nous sommes l'avenir de la planète. J'ai vu les chiffres. Je sais ce qui s'en vient. Alors, préparons-nous, d'accord, et commençons à préparer le terrain pour que nous puissions faire les choses correctement, afin d'éviter ce conflit. C'est ce que j'ai fait. Je veux simplement terminer cette petite histoire en disant que nous nous sommes assis autour de la table avec mes trois enfants et que je leur ai dit : « Le greffier du Conseil privé veut savoir ce qu'il faudrait pour que vous vouliez travailler pour la fonction publique fédérale ». Et ils ont simplement posé leurs crayons... pas leurs crayons, leurs fourchettes et ont dit : « Qui? ».
(Rires)
J'ai dit, le gars à qui j'ai parlé à l'écran, ce gars-là, le gars plus âgé, et j'ai dit : « Oui, il dirige la fonction publique. Il veut savoir. » Et deux de mes enfants ont répondu, et il a dit... et mon fils était l'aîné. Il s'appelle Mandela pour des raisons évidentes. Mandela a dit : « Je n'ai aucun intérêt à travailler dans un endroit où toi, papa, tu dois travailler si dur juste pour être considéré comme un être humain. Je ne vais pas faire ça. » Et ma fille a dit : « Mmhmm ».
(Rires)
« Non, non, non. Quand tu n'auras plus à faire ce que tu fais, papa, on y réfléchira peut-être. Mais pour le moment, il y a autre chose à faire. L'Afrique bouge, l'Afrique bouge. » J'ai donc dû, à contrecœur, d'une certaine manière, retourner le dire à Ian, et il a dit que nous avions beaucoup à faire. Et je pense que, encore une fois, le moment a été très marquant, ces conversations avec lui et d'autres hauts dirigeant·es comme Caroline Xavier qui ont assumé ce rôle historique comme les autres députés qui sont entrés dans cet espace. Vraiment, encore une fois, les réseaux ont commencé à se former, les réseaux ont commencé à proliférer partout, n'est-ce pas? Cela n'est pas arrivé uniquement à cause de Floyd. Cela s'est produit, parce que nous avons créé cet espace, le Réseau des exécutifs noirs. Je pense que nous avons créé cet espace. Depuis, ils ont tracé leur propre voie. Il semblait y avoir un désir profond et sincère de redéfinir à quoi ressemble le leadership, car il semblait y avoir des difficultés avec les bases du leadership en ce qui concerne les droits de la personne et l'équité. Pour moi, équité et droits de la personne sont synonymes. Ils font partie intégrante de la même chose.
Je vais avancer un peu plus rapidement maintenant, car je voulais parler un peu de mon passage au ministère de la Justice. Donc, après cette période très tumultueuse où je n'avais en fait aucune intention de revenir au gouvernement, je participais à un programme d'échange, je travaillais dans les communautés noires, passant le meilleur moment de ma vie, je travaillais 20 heures par jour, je m'occupais de missions, de dossiers, au niveau national et international. J'ai participé à un groupe d'experts avec le fils de Marcus Garvey. Pour celles et ceux d'entre vous qui connaissent Marcus Garvey, c'était un temps où je me disais : ça y est, je suis prêt à quitter ma vie dans la fonction publique. Et puis, le ministère de la Justice est venu frapper à ma porte : « Voudriez-vous être un cadre ici pour nous aider dans cette affaire de lutte contre le racisme? ». Et j'ai dit : « Eh bien, je m'apprête à partir ». Pourquoi devrais-je revenir pour faire ça maintenant? Mais ensuite, les gens, mes mentors et mes coachs m'ont dit : « Vous savez quoi, Richard? Peut-être que cela vaut la peine de venir, car vous pouvez peut-être influencer certains changements ici de la même manière que vous l'avez fait à l'extérieur? ». Après tout, lorsque j'ai commencé en 1996 comme graphiste, mon plan était d'entrer au ministère de la Justice et de changer la façon dont il traite la justice pour les personnes noires. Je ne savais pas à quel point c'était stupide de penser que je pourrais faire cela en tant que graphiste, sans avoir la formation et l'expérience nécessaires. J'avais donc l'occasion de le faire.
Je dois dire que l'appel à l'action, encore une fois, a fourni une incitation morale à le faire. Il y avait des sous-ministres là-bas qui étaient prêt·es pour cela, le sous-ministre, notre François Daigle, Shalene Curtis-Micallef ont créé un espace et ont soutenu cela autour d'autres tables de sous-ministres pour faire avancer ces choses, pour que nous puissions faire avancer nos cadres de travail, pour que nous puissions faire avancer cette notion de responsabilité en matière d'équité. Ce fut une période remarquable que de pouvoir s'asseoir autour de tables avec d'autres sous-ministres pour tenter de planifier la manière d'effectuer ce travail, même si l'institution elle-même n'était pas prête pour le genre de changement que nous essayions de lui inculquer. Les autres sous-ministres des autres organisations, IRCC, le MDN et Affaires mondiales Canada, ont vraiment beaucoup contribué à ce travail au début. J'ai fait venir des gens et c'est, je pense, que nous avons commencé à laisser notre empreinte avant mon chant du cygne et mon départ du gouvernement. J'ai fait venir quelqu'un nommé Martin Nicholas, que certain·es d'entre vous connaissent, un gars très brillant qui est à la retraite, mais revient travailler avec nous. Il aurait travaillé gratuitement. J'ai dit : « Je dois vous payer quelque chose. C'est de l'esclavage. Nous devons vous donner quelque chose. »
Il a proposé des choses comme soutenir nos missions avec le Ministère... avec Statistique Canada sur la modélisation prédictive afin que nous puissions produire des données de base sur la disponibilité au sein de la population active, afin que nous puissions prédire à quoi ressemblerait l'avenir, à quoi ressemblera la représentation future, des choses révolutionnaires. Ce que les organismes centraux devraient faire, nous le faisions, et nous établissions des repères basés sur ces chiffres orientés vers l'avenir. Nous étions à la pointe du progrès au sein de l'une des organisations les plus conservatrices de la fonction publique, et c'était tellement, tellement amusant. Je ne peux pas vous dire à quel point c'était amusant de faire ça dans un endroit où je pense... j'ai des juristes dans ma famille. Alors, en étant assis autour de la table et en étant parvenu à convaincre un groupe de juristes que c'était la bonne chose à faire, j'avais le sentiment d'avoir accompli beaucoup de choses. L'un des aspects formidables de ce secrétariat et du travail autour du secrétariat de la lutte contre le racisme et la discrimination, c'est que le travail se poursuit. La haute direction de cette organisation en a fait une entité permanente au sein de l'organisation. C'est vraiment essentiel alors que d'autres institutions estimaient que ce serait une initiative sur deux ans.
Je veux parler brièvement de la fonction publique de l'Ontario, où des gens diraient que je me suis enfui et d'autres diraient que j'y ai été accueilli, parce qu'on était prêt à accepter ce que j'avais à vendre. Vous avez vu ici la sous-ministre Richardson, qui est une femme mi'kmaq. Demain, lors de cette conférence, vous aurez la sous-ministre Roda Muse, une femme noire musulmane qui porte le hidjab, qui est sous-ministre des Affaires francophones de la province de l'Ontario. C'est plutôt sympa. Ce sont des gens avec qui je travaille. J'ai une dirigeante principale des talents noire, l'équivalent de dirigeante principale des ressources humaines, qui essaie activement de s'assurer que la haute direction de la FPO est représentative. Nous ne faisons pas ce que nous devrions faire ici pour garder les talents... les gens, nous allons voler vos talents et les utiliser à bon escient, je vous l'assure.
Je pense que ce qui est vraiment important à n'importe quel niveau de ce travail, et je vais conclure maintenant, c'est que les organisations doivent être prêtes. Nous avons besoin du soutien tacite de la haute direction pour pouvoir accomplir ce travail. Ce travail ne peut pas être réalisé uniquement grâce au travail ou au talent de personnes comme moi. Ce n'est tout simplement pas possible. L'accent mis sur les résultats, l'accent mis sur la responsabilité, l'accent mis sur la mesure, l'accent mis sur les données, tout ça entre toujours en jeu dans ce travail. Si vous ne faites pas ces choses, alors vous n'êtes pas sérieux. Si vous n'êtes pas sérieux, vous allez avoir des ennuis. La sous-ministre Richardson de la FPO a mentionné qu'il y avait notamment des poursuites judiciaires et qu'on ne voulait pas d'un grand recours collectif comme celui auquel vous êtes confronté·es, avec les personnes noires. Et donc, de même que j'ai essayé d'aider et de soutenir pour éviter cela ici dans la fonction publique fédérale, je vais essayer de faire de même au sein de la fonction publique de l'Ontario et dans tout autre espace, franchement, qui veut aller au fond des choses pour traiter les gens comme ils devraient être traités.
Je voudrais terminer sur quelques points très rapidement, car j'aimerais avoir la conversation. Nous devons être capables de gérer et d'affronter nos peurs au sein de la fonction publique, et la plus grande peur au sein de la fonction publique est la peur d'une planète noire ou, comme Jesse Wente l'a dit ce matin, la peur de la perte. Que va-t-il se passer lorsque Richard deviendra sous-ministre de la fonction publique fédérale? Que va-t-il se passer? Que va-t-il se passer? Qui aura quelque chose à perdre? Vais-je embaucher tous les membres de la communauté noire pour tous les remplacer? Non, c'est ridicule, n'est-ce pas? Mais quelle est cette peur? Et confronter cette peur. Le travail avec les volontaires, nous avons passé beaucoup de temps à travailler uniquement avec des haut·es dirigeant·es et d'autres personnes qui voulaient faire avancer ces choses, et lorsque nous avons obtenu des résultats, c'est vrai, d'autres personnes ont suivi. Nous nous sommes concentrés sur les gens et avons essayé de prendre soin d'eux. Quand l'affaire Floyd est arrivée, nous avons pris une semaine de congé. L'équipe noire ne pouvait pas fonctionner. Comme certains d'entre vous l'ont peut-être lu dans l'un de mes articles, j'ai passé la semaine à compter le stuc au plafond et à me demander : qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qui se passe? Que vais-je dire à mes enfants? Comment vais-je faire face à mes enfants? Donc, nous devons prendre soin des gens, surtout dans ce travail, car ce travail est difficile.
Aborder le traumatisme intergénérationnel, je pense que c'est l'une des choses les plus importantes auxquelles je suis confronté au sein des communautés noires à la FPO, mais il ne s'agit pas seulement de traumatisme dans les communautés que nous servons et soutenons. Nous avons besoin d'instruments de politiques qui soutiennent également le traumatisme au sein de la communauté plus large, le traumatisme institutionnel, le traumatisme auquel l'effectif est confronté à un certain niveau lorsqu'il voit des personnes noires, autochtones et racisées souffrir sur leur lieu de travail et être maltraitées, pas le traumatisme (inaudible) que, selon ce que je comprends, les gens envisagent ici dans la fonction publique fédérale, où nous exprimons notre douleur et notre souffrance et cela nous rend d'une certaine manière humains, mais qui s'attaquent réellement aux causes profondes et trouvent des moyens de travailler vers la justice réparatrice, qui doit faire partie intégrante de notre travail. Cela fait partie de l'ensemble de notre travail.
Je suis tout à fait conscient du fait que nous avons toujours centré la Charte autour de ce travail. Il n'y a pas de loi sur la diversité, l'équité et l'inclusion. C'est donc simplement quelque chose d'agréable à faire. Nous avons l'équité en matière d'emploi, qui comporte une certaine rigueur. Nous avons les droits de la personne. À l'exception de la Commission des droits de la personne, nous avons une certaine rigueur à ce sujet. Nous avons, par exemple, l'article 15 de la Charte des droits et libertés, qui mentionne que nous devons agir correctement envers des personnes comme moi, les personnes racisées dans cet espace, les Autochtones, les personnes différentes. Les greffières et greffiers se concentrent sur les valeurs et l'éthique, je pense que c'est une question très intéressante. Lorsque j'ai commencé à travailler dans la fonction publique fédérale il y a plusieurs décennies, j'étais très perplexe face aux gens qui venaient dans mon bureau pour demander de l'aide parce qu'ils étaient victimes de discrimination malgré l'existence de cette politique sur les valeurs et l'éthique. C'était la première chose que j'ai reçue. Comment pouvons-nous avoir des valeurs et de l'éthique en place alors que des personnes sont maltraitées? Alors, peut-être devrions-nous intégrer cela dans les régimes de valeurs et d'éthique dont nous disons qu'ils sont si importants, car de toute évidence, ils ne semblent pas fonctionner très bien ou ils ne sont pas adéquats.
J'ai une théorie selon laquelle la suprématie blanche et le racisme sont des valeurs fondamentales de ce pays, et cela s'infiltre dans la fonction publique et c'est pourquoi il est si difficile de les éradiquer, car cela fait partie de nous. Cela fait partie de cet endroit et nous devons faire ce que nous pouvons pour y remédier. Le niveau d'ambition doit être plus élevé qu'il ne l'est actuellement, sinon nous allons régresser là ou nous constatons des réactions de résistance. L'accent mis sur la préservation de notre humanité collective doit faire partie intégrante de l'amour que nous avons les un·es pour les autres en tant qu'êtres humains. Encore une fois, ce langage d'amour, c'est nous. Si vous regardez avec un peu d'amour et de dignité, cela contribue grandement à notre capacité à réaliser l'équité et à résoudre les problèmes de longue date auxquels nous sommes confrontés au sein de la fonction publique.
Et sur ce, je vous remercie beaucoup pour ce temps et j'attends avec impatience notre conversation.
(Applaudissements)
[00:29:32 Richard D. Sharpe quitte le podium et s'assoit à côté de Serge Bijimine.]
Serge Bijimine : Vous ont-ils envoyé suivre une formation en français à la FPO?
Richard D. Sharpe : Non, j'ai appris mon français juste avant de partir d'ici. Et puis, je ne l'ai pas utilisé pendant une année entière. Alors, je suis désolé, mon français est nul.
(Rires)
Et je l'ai tellement perdu, parce que je ne l'ai pas pratiqué, mais je pourrais peut-être comprendre.
Serge Bijimine : Non, c'est vraiment très bien.
Quelques points à aborder, et il y a beaucoup de questions et je veux juste avoir une discussion fluide. Alors, tout d'abord, merci pour ce discours inspirant. Ensuite, merci de montrer du courage face à l'adversité. Et une question que je me pose, et je suis sûr que beaucoup de gens se la posent aussi, lorsque vous vous opposez au statu quo et que vous commencez à pousser pour améliorer les choses, car c'est finalement de cela qu'il s'agit, vous avez tendance à faire face à beaucoup de résistance de la part de personnes qui ne veulent pas changer, car souvent, pour beaucoup de gens, le changement est effrayant à cause de l'inconnu, mais cela ne doit pas nécessairement être le cas. Souvent, le changement finit par être bénéfique. Que dites-vous à quelqu'un qui regarde en ce moment même, et il y a 3 000 personnes à l'écran également, qui doit actuellement affronter le fait de mettre les gens mal à l'aise, qui veut remettre en question le statu quo et continuer son travail et sa carrière dans la fonction publique, donc être capable de réaliser les trois choses. Alors, quel genre de conseils lui donneriez-vous?
Richard D. Sharpe : Être capable de réaliser les trois choses? Bien. Donc, si vous voulez défier l'autorité, vous devez alors être capable de gérer le risque de répercussions. Peu m'importe. Il y a quelque chose qui ne va pas chez moi, je n'ai pas peur. Je pense que la peur est une bonne chose, elle peut vous protéger du danger, mais je pense que pour l'essentiel, il est bon d'avoir un peu de sens d'auto-préservation. Si vous voulez remettre en question des systèmes, vous devez être très bien informé sur ce que vous remettez en question et apporter la critique ou la description, comme l'avait dit l'un des membres de la table ronde, mais apporter aussi la solution. Donc, je viens avec ma grosse matraque, mais j'apporte aussi un gâteau aux fruits, le gâteau aux fruits que ma mère a fait et qui a du vin dedans.
(Rires)
Et donc, vous pouvez le présenter de manière à ce que cela ressemble à un genre de... Je pensais qu'on me matraquait, mais en fait, voici un cadeau, n'est-ce pas? Donc, je pense que c'est bien d'essayer à la fois de remettre en question, mais aussi de donner. J'ai énormément d'empathie pour les gens que j'ai défiés dans le passé, parce que je vois beaucoup de peur. Comme je l'ai dit, ils se demandent : qu'est-ce que c'est que ce Richard Sharp avec ces cheveux et qui en plus s'exprime bien?
(Rires)
Non, mais c'est vrai. C'est ce qu'il y a de plus effrayant... la seule chose plus dangereuse qu'un homme noir en colère c'est un homme noir qui s'exprime bien, qui est intelligent et qui n'a pas peur. C'est dangereux, et ce qui est vraiment dangereux, c'est un homme noir qui aime son peuple. Parce que, si vous aimez votre peuple, alors vous êtes redoutable, n'est-ce pas? Si vous avez toutes ces qualités. Donc, je pense que les gens me voient arriver et se disent : « Ouah! ». Mais en réalité, je le fais toujours avec amour et grâce et autant que possible sans nuire aux gens, mais simplement pour leur faire comprendre que ma vie dépend littéralement de politiques et de programmes mis en place pour soutenir notre bien-être et notre équité au sein de la société, et la vie de mes enfants et de leurs enfants. Donc, je n'ai absolument rien à perdre en défiant, mais ce n'est pas le cas d'autres personnes et vous devez évaluer votre niveau de sécurité personnelle. Vous devez payer le loyer. Le policier a une arme à feu. Vous devez évaluer votre niveau de confort et de sécurité personnelle afin de pouvoir continuer ce que vous allez faire. Donc, je sais que c'est un défi pour beaucoup de gens.
Serge Bijimine : Et juste pour rappel, et je pense que beaucoup de gens dans la salle ne le savent pas, mais comme vous l'avez dit, la « peur » a effectivement conduit à la nomination de quatre sous-ministres noir·es, environ 17 SMA noir·es à l'heure actuelle, et je pense qu'il y a entre 30 et 40 DG noir·es. Donc, la peur a finalement contribué au système et a rendu tout le monde meilleur dans le système, et je pense que c'est quelque chose que les gens doivent également se rappeler. Je me souviens toujours à quel point c'était effrayant dans les années soixante lorsque les francophones voulaient obtenir une plus grande place à la table, et c'était très effrayant pour certaines personnes. Et ils ont mis en place la Loi sur les langues officielles et, tout d'un coup, une foule de francophones sont venus et ont enrichi le pays. Et puis, dans les années 1990, ils ont mis en place la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Les femmes sont entrées sur le marché du travail et ont enrichi notre pays d'autant plus, à tel point que je pense que 50 ou 55 % des cadres supérieur·es au Canada sont maintenant des femmes, et je ne vois pas les craintes que certaines personnes exprimaient à l'époque se réaliser. Beaucoup de ces peurs sont irrationnelles, mais je pense que plus nous laissons entrer de personnes, plus cela renforce notre pays. Et puis, d'un point de vue économique, vous ne laissez aucun talent derrière. Donc, chaque fois que vous avez peur de quelque chose, ne pensez pas à l'instant présent. Pensez à l'avenir. À quoi cela ressemblerait-il dans cinq, dix ans?
L'autre question que j'ai à vous poser est la suivante : ce que nous avons remarqué en matière d'équité pour les personnes noires et de justice sociale peut être en grande partie une mode qui reflète l'instant présent, puis s'éteint. Comment faire en sorte que cela ne se reproduise pas cette fois-ci?
Richard D. Sharpe : C'est donc une excellente question, car je pense que certaines personnes pensent que nous sommes arrivé·es, parce que nous avons quelques sous-ministres noir·es et quelques SMA, donc nous sommes arrivé·es. Mais comme nous le voyons dans de nombreux endroits, lorsque vous embauchez certaines de ces personnes et que vous ne prévoyez pas de relève, certaines de ces personnes sont embauchées et placées dans des postes de direction, puis elles prennent leur retraite très rapidement. Et puis, vous avez ce vide. Qui les remplace? Plus de personnes blanches ou d'autres personnes racisées. Donc, pour éviter que cela soit une mode, nous devons nous assurer que c'est mesurable. Ainsi, tout ce que nous faisons, même chaque mobilisation, chaque mobilisation communautaire, doit être évalué. Quels sont les résultats? Comment le mesurons-nous? Qui est responsable de veiller à ce que cela soit fait? Quand? Pouvons-nous en rendre compte et mobiliser les gens à ce sujet? Et puis, recommencer.
Ainsi, au ministère de la Justice, nous avons élaboré ce cadre, ce cadre de résultats en matière de lutte contre le racisme et la discrimination, qui est suffisamment complexe et suffisamment simple pour que vous puissiez poursuivre le travail au cours des deux prochaines années, n'est-ce pas? C'est mon plan de faire quelque chose comme ça. Je suis en train de mettre cela en œuvre dans la fonction publique de l'Ontario pour intégrer l'équité pour les personnes noires dans tout ce que nous faisons. Quand je suis arrivé ici en 2019, j'ai parlé de l'inclusion des personnes noires. Comment l'inclusion des personnes noires est-elle intégrée dans nos cadres de politiques, nos programmes, notre gestion des personnes? Oui, donc, afin de vous assurer que ce n'est pas une mode, comme vous le dites, vous commencez à l'intégrer dans ce processus et vous vous assurez d'avoir une représentation, non seulement des personnes noires, brunes ou autochtones, mais aussi des personnes qui ont les connaissances requises, des personnes qui ont été sur le terrain, des personnes qui comprennent l'expérience vécue et qui sont prêtes à défendre la cause en disant et en faisant ce qui est juste autour de ces tables de la haute direction. Donc, si vous avez ces éléments en place et les bonnes personnes en place, vous êtes prêt à prendre votre envol.
Je n'ai vu cela que quelques fois. J'ai vraiment apprécié cela au ministère de la Justice, où l'on me donne l'espace pour faire mon travail et constituer une équipe qui peut nous aider à le faire. Je fais la même chose dans la FPO. Alors, nous verrons. J'espère que nous serons les meilleurs dans tous les domaines pour aborder le racisme envers les personnes noires et l'inclusion des personnes noires, je l'appellerai « inclusion des personnes noires », dans l'ensemble du Canada. Je vais éviter la fonction publique fédérale, désolé les gars, et aller travailler avec l'ONU, car d'autres États nations, pas seulement les nations occidentales, mais d'autres nations, sont également intéressés. Ceux qui ont été colonisés sont intéressés par la façon de renforcer leurs services publics afin d'être mieux représentés de manière significative. C'est un bon travail. J'aime le faire.
Serge Bijimine : Et je pense que cela doit se produire uniquement pour avoir une meilleure capacité d'élaboration de politiques, de la même manière que nous devrons intégrer l'IA dans l'élaboration des politiques. Nous devrons intégrer (inaudible). Nous devrons intégrer la réconciliation avec les Autochtones. Donc, toutes ces choses devront faire partie de ce que nous ferons et de la manière dont nous élaborerons nos politiques à l'avenir. Je vais passer à la question à l'écran, puis j'en aurai une moi-même.
Richard D. Sharpe : D'accord.
Serge Bijimine : Voici la question à l'écran : « Quels conseils donneriez-vous à l'ensemble des sous-ministres et des haut·es dirigeant·es non noir·es actuel·les du gouvernement du Canada lorsqu'il s'agit de mieux soutenir le personnel noir de la fonction publique fédérale? ».
Richard D. Sharpe : C'est une bonne question. Je peux citer quelques éléments, mais je vais essayer d'être très bref. Il se passe actuellement des choses préoccupantes, et je mettrais au défi nos sous-ministres d'être conscient·es de ce qui se passe du côté de la gestion des personnes, en particulier en ce qui concerne les dirigeant·es noir·es et particulièrement les femmes noires qui font face à un nombre disproportionné... font face à ces enquêtes pour des questions ironiquement liées à (inaudible) et à l'éthique. Tout d'un coup, ces choses surgissent. Je l'appelle la purge noire. Après tout le travail que nous avons accompli, il y a cette résistance recul et parfois le système essaie de se réinitialiser. Je suis très conscient de ce qui s'est passé les années précédentes avec les examens de programmes, et ainsi de suite, où les personnes noires et les autres personnes racisées étaient les dernières embauchées et les premières licenciées.
Je pense donc qu'il est inacceptable, après les progrès que nous avons réalisés, que les gens utilisent des politiques, des systèmes et des processus pour réduire à néant certains de ces progrès. Donc, je dirais simplement d'être vraiment attentif aux types de résultats que vous essayez d'obtenir en termes de représentation, de mieux-être au travail et de décomposer vos données. Continuez à demander des données ventilées sur l'équité en matière d'emploi afin de savoir exactement qui est touché par les politiques, les plaintes, les départs, les embauches, n'est-ce pas? Si nous le faisons régulièrement et que vous effectuez un suivi au sein de votre organisation, vous pourrez alors intégrer des responsabilités. Si vous ne le faites pas et que vous continuez comme d'habitude, alors nous allons perdre des gens. Nous allons perdre de bonnes personnes sur lesquelles nous avons investi beaucoup de temps et d'efforts pour les amener à occuper certains de ces postes de pouvoir et d'influence afin de contribuer à influencer l'élaboration des politiques et tout ce qui s'ensuit.
Ce n'est qu'une chose parmi tant d'autres, mais les SM ne devraient pas... et prendre conscience de cela, c'est avoir ces conversations directement avec les employé·es et les dirigeant·es noir·es au sein de vos institutions. Vous serez filtré·e. Vous aurez des informations aseptisées. Le ou la sous-ministre : « Tout est merveilleux. Les personnes noires sont heureuses. » Non, elles ne sont pas heureuses, et elles peuvent en fait souffrir, et si vous n'avez pas un canal direct avec elles, si vous ne créez pas d'occasions de les mobiliser, alors vous passerez à côté de ces talents dont vous parliez qui ne sont pas pleinement utilisés.
Serge Bijimine : Parfait.
J'ai une dernière question, et je vais me mettre sur la sellette. En tant que haut dirigeant, haut dirigeant noir, je veux toujours savoir ce que je pourrais faire pour aider à soutenir plus de personnes de manière plus efficace. Comment puis-je être tenu responsable?
Richard D. Sharpe : Vous ne pouvez pas vous mettre sur la sellette, parce que je sais ce que vous faites dans les coulisses.
Serge Bijimine : Ne vous inquiétez pas pour ça.
(Rires)
Richard D. Sharpe : Donc, pour les dirigeant·es noir·es, et j'essaie de le faire moi-même. Je n'arrive pas à croire que je dis cela, parce que je n'ai jamais cru que je serais un cadre dans la fonction publique fédérale. J'avais l'habitude de dire cela au ministère de la Justice, et mon SMA me disait : « Ne dites pas cela. Les gens penseront que vous ne pensez pas être qualifié. » Mais ce n'est pas du tout ça. Je ne pensais tout simplement pas... pourquoi vont-ils me mettre dans cet endroit? Je vais démolir l'endroit, n'est-ce pas? Dans mon rôle actuel, mon rôle est d'aider à amener les autres, à créer un espace pour amener les autres à aider les autres. C'est d'aider à jeter les bases avec mon équipe de direction. J'ai une équipe de direction très diversifiée au sein de la fonction publique de l'Ontario, mais parmi les équipes de direction que les dirigeant·es noir·es pourraient avoir ici, où ce n'est pas aussi diversifié, il s'agit de jeter les bases pour que vos collègues puissent embaucher, promouvoir, perfectionner, encadrer et parrainer. C'est ce que nous devrions faire en tant que dirigeant·es noir·es pour nos communautés et nous encourageons les autres dirigeant·es à le faire au sein de leurs organisations pour soutenir les aspirations des personnes noires sur le lieu de travail.
Serge Bijimine : Parfait.
Cela étant dit, Richard, merci, au nom de tout le monde ici et des 3 000 personnes à l'écran. Et pour les gens ici et les gens à l'écran, si vous vous demandez à quoi ressemble une véritable inclusion, Richard vient de donner une classe de maître sur la façon de le faire.
Encore une fois, merci beaucoup, Richard.
[00:44:21 Le logo de l'EFPC s'affiche à l'écran.]
[00:44:25 Le logo du gouvernement du Canada s'affiche à l'écran.]